Le Cameroun attendra 5 ans pour exercer en toute plénitude ses droits de souveraineté sur la zone...
C'est jeudi 14 août 2008 prochain, conformément aux dispositions de l'Accord de Greentree entre notre pays et le Nigeria, que le Cameroun devra prendre possession de la presqu'île de Bakassi. La rétrocession de ces territoires la semaine prochaine se fera selon, les dispositions de l'alinéa 2 (b) de l'annexe de cet accord, en présence des représentants du Secrétaire général des Nations Unies et ceux des quatre pays témoins à la signature de cet accord (Etats-Unis d'Amérique, France, Allemagne et Grande Bretagne). Une cérémonie de rétrocession qui aura lieu dans la localité de Jabané, située au Sud-est de la péninsule. Le retour officiel de ce territoire au Cameroun est encore jalonné d'un certain nombre de conditions, relatives notamment aux droits des citoyens nigérians qui choisiront de continuer à vivre dans la zone.
Les " avantages " dont ils vont ainsi bénéficier, concernent entre autre, la non application à ceux-ci, de toute " législation douanière ", encore moins celle sur " l'immigration aux ressortissants nigérians vivant dans la Zone qui se rendent directement du Nigéria dans la Zone dans le but d'accéder à leurs activités". Les deux pays devront en outre travailler en collaboration pour le règlement des questions liées au maintien de l'ordre dans la presqu'île. Selon l'Accord, le Cameroun devra permettre aux officiers et au personnel en uniforme des forces de police nigérianes d'avoir accès à la zone, en collaboration avec la police camerounaise, avec un minimum de formalités, à des fins d'enquête sur des crimes et délits ou d'autres incidents impliquant exclusivement des ressortissants nigérians.
Période transitoire
Si les navires civils battant pavillon nigérians auront encore le droit de circuler dans la péninsule pendant cette période transitoire, il n'en sera plus de même pour ceux de guerre. Mais l'entrée en vigueur de cette période transitoire le 14 août prochain n'entraînera pas que des avantages pour les ressortissants nigérians non établis dans la région. Ils devront, dans le cas de l'acquisition de terrains dans la zone, se conformer aux lois et règlements du Cameroun. Au rang des contraintes qui iront au-delà des cinq années de période transitoire, il y a celles qui imposent au Cameroun de garantir "aux ressortissants nigérians vivant dans la presqu'île de Bakassi l'exercice des libertés et droits fondamentaux consacrés par le droit international des droits de l'homme et les autres règles pertinentes du droit international ". Ceci dans la mesure où notre gouvernement ne pourra ni leur imposer de changer de nationalité, de culture, de langue ou de croyance. Ceux-ci seront en outre libres de poursuivre leurs activités agricoles et piscicoles dans la région.
Ces nombreuses restrictions et contraintes à l'application des clauses de la décision rendue le 10 octobre 2002 par la Cour internationale de justice (Cij) de La Haye constitue néanmoins un précédent en la matière. A titre de comparaison, la mise en application de l'arrêt de la Cij le 3 février 1994 au sujet du différend frontalier opposant la Libye au Tchad sur la bande d'Aouzou avait nécessité quatre mois pour sa mise en œuvre, alors que les tensions entre les deux pays n'étaient pas moins exacerbées. Le Cameroun et le Nigeria courent vers leur 6ème année, et il faudra encore attendre cinq années supplémentaires
Même si les dispositions de l'article 7 de l'Accord de Greentree indiquent notamment que " Le présent Accord ne peut en aucune manière être entendu comme une interprétation ou une modification de l'arrêt de la Cour internationale de Justice du 10 octobre 2002, dont il est une simple modalité d'application ".