Cameroun - Calixthe Beyala: «Il manque de la lumière au Cameroun en ce moment»

Par Otric NGON | Cameroon-Info.Net
YAOUNDE - 14-May-2018 - 12h15   21310                      
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Calixthe Beyala Archives
Invité à participer à la troisième édition du Salon du livre de Yaoundé qui se tient en ce moment, l’écrivaine en a profité pour expliquer les raisons de son long silence littéraire.

Le dernier roman de Calixthe Beyala, Le Christ selon l'Afrique, date de 2014. Il a d’ailleurs reçu le Prix de L'Algue d'Or du meilleur roman francophone. Depuis lors, rien. L’écrivaine semble muette. Elle explique d’ailleurs les raisons de ce long silence littéraire dans une interview accordée à Cameroon Tribune et publiée le vendredi 11 Mai 2018.

«En ce moment, j’écris, mais il me manque de la lumière, parce que j’ai l’impression qu’il manque de la lumière au Cameroun en ce moment. J’ai découvert que dans ce pays, les gens ne s’aiment pas, se jalousent beaucoup, que l’argent est devenu le centre d’intérêt de toute une génération qui fonctionne par la ruse et non par l’amour. On ne partage plus l’amour, et un auteur a besoin d’une bonne dose d’amour pour écrire. Même en plein chaos, le romancier a pour fil conducteur la lumière.

Au Cameroun, l’auteur que je suis cherche la lumière. J’ai découvert qu’on prononçait le mot « Dieu » sans avoir une densité christique à l’amour. L’auteur que je suis s’interroge sur ce que nous devenons, parce qu’il est très facile de critiquer la politique, mais le problème vient de nos cellules familiales. Il y a une véritable crise morale que nous traversons.

Et l’écrivain que je suis, ne sait que faire, car je ne pourrais offrir à mes lecteurs un univers où il n’y a pas de beauté. Je parle d’amour, de tolérance. Une infime part de toutes ces valeurs humanistes doit certainement exister quelque part, mais j’ai du mal à utiliser cette exceptionnalité comme une généralité.

Je peux me tromper, je n’ai pas la science infuse, mais n’oubliez pas que l’auteur est une éponge sensible, fragile, qui absorbe tout, qui est le témoin d’une société. Vais-je écrire 500 pages sur le mensonge, la dépravation, la ruse, les interdits, la méchanceté, la jalousie ? Un auteur n’est que le témoin de son temps».

Auteur:
Otric NGON
 @OtricNgonCIN
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