Cameroun - Complexe touristique de Yoyo: Le gouvernement torpille un projet de 100 milliards et 400 000 emplois

Par Dominique Mbassi | Repères
Yaoundé - 27-Nov-2013 - 15h03   54915                      
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Depuis la signature de la convention en octobre 2009, le Cameroun peine encore, entre autres, à désenclaver et à desservir en eau et électricité le site de 10 000 hectares prévu pour l'accueillir.
Le partenaire financier émirati s'impatiente. Plus de quatre ans après la signature de la convention, le gouvernement camerounais en est encore aujourd'hui à rassurer la partie émiratie de son intérêt pour le projet de construction d'un complexe économique et touristique à Yoyo-Mouanko, dans la Sanaga maritime. Dans une correspondance datée du 13 novembre 2013, le ministre de l'Economie, de la Planification .et de l'Aménagement du territoire (Minepat), M. Emmanuel Nganou Djoumessi, annonce au président directeur général du groupe Ruwaad LLC que «des dispositions sont prises actuellement pour la viabilisation du site par l'administration camerounaise». Ces mesures, encore envisagées, concernent «la mise à disposition du site et son transfert à la CIP (société chargée de la gestion du projet), la mise en place des réseaux d'eau, d'électricité et de télécommunications, la réalisation de la voie d'accès au site» (route Edéa-Mouanko-Yoyo.) La correspondance du Minepat a été rédigée au lendemain d'une réunion tenue lundi 11 novembre, au cours de laquelle M. Nganou Djoumessi a sommé les différentes administrations concernées de remplir leur cahier de charges sous huitaine. Pour inviter ainsi les différents intervenants à sortir de leur torpeur, il aura fallu que le partenaire financier du mégaprojet relance la partie camerounaise mille fois. Autant constater avec le secrétaire général des services du Premier ministre que rien, ou pas grand-chose, n'a été fait jusqu'ici. Une source au sein du comité interministériel de suivi de ce projet rapporte les propos tenus par M. Louis Paul Motaze au cours d'une réunion qu'il a présidée récemment sur le sujet: «Lors de son dernier voyage en France, le Président de la République m'a interpellé sur l'état d'avancement du projet de Ruwaad. J’ai eu du mal à lui donner une réponse satisfaisante». Ce jour-là, la même source se souvient que les ministres présents à la séance de travail avaient eu de la peine à présenter des actions concrètes menées devant permettre au gouvernement camerounais de tenir ses engagements contractuels. Les actions du gouvernement n’encouragent pas l’investisseur. A la vérité, quatre années plus tard, les actions réalisées sont de nature à décourager Ruwaad. La Cameroon International Projet Company (CIP), société chargée de la gestion du projet, n'a pas encore d'existence légale. Si le ministère des Domaines, du cadastre et des affaires foncières a presque rempli son contrat en sécurisant le site, le Minepat s'est contenté de financer la réalisation des cartes du site par l'Institut national de la cartographie, le ministère de l'Eau et de l'Energie se targue seulement d'avoir élaboré les termes de référence pour les réseaux d'eau et d'électricité, tandis que le ministère des Travaux publics annonce avoir bouclé les études de la route Edéa-Dizangué -Mouanko-Yoyo censée désenclaver le site du projet. Ces actions préalables auraient dû pourtant connaître leur aboutissement il y a belle lurette, afin d'ouvrir la voie à l'entrée en scène de Ruwaad qui, pour investir le premier sou, veut savoir comme consigné dans la convention que le site est disponible, que les populations ont été déguerpies et dûment indemnisées. Justement, le décret d'indemnisation des populations riveraines est toujours en attente de signature à la Présidence de la République. Depuis le recensement des biens meubles et immeubles, les populations sont coupées de toute information officielle. D'où la panique et le doute qui les habitent désormais. D'autant que le projet nourrit des appétits et rivalités des communautés villageoises, autant que des élites locales ou de différentes administrations publiques. «Le projet est retardé par des exigences égoïstes des uns et la prise en compte des intérêts personnels des autres. Tenez par exemple, alors que les investisseurs ont jeté leur dévolu sur le site situé à la pointe de Souellaba, là où la mer est propre, certaines hautes personnalités camerounaises ayant réalisé des investissements sur place ont tout fait pour qu'on installe le projet à un endroit où la mer est sale. Ce qui constitue une mauvaise option pour un site destiné à accueillir des touristes du monde entier. Après des tiraillements sur cet aspect du projet, finalement le Président de la République a dû intervenir pour que les exigences de Ruwaad soient prises en compte », souffle une source bien imprégnée du dossier. Autant tout est allé vite jusqu'à la signature de la convention, autant depuis lors, le projet peine à prendre corps. Le comité interministériel vient ainsi de changer d'orientation au projet en décidant de l'ouvrir à d'autres partenaires pour l'heure inexistants, alors même que Ruwaad reste disposé à financer entièrement le projet. Toute chose qui désole la représentante de Ruwaad, qui a tout misé et s'est investie à fond pour que le projet se matérialise.




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