Cameroun - Lutte contre Boko Haram: Plus de 100 condamnations à la peine de mort prononcées dans la Région de l’Extrême-Nord en un an

Par Wiliam TCHANGO | Cameroon-Info.Net
YAOUNDE - 23-Aug-2016 - 11h46   51430                      
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Maitre Mohamad Al Amine Wiliam Tchango
Les avocats exerçant dans la partie septentrionale du Cameroun dénoncent le mauvais traitement infligé à ces personnes condamnées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

Entre juillet 2015 et juillet 2016, les tribunaux de la Région de l’Extrême-Nord du Cameroun ont prononcé plus de cent condamnations à la peine capitale. L’information est de Maitre Mohamad Al Amine, avocat au barreau du Cameroun, exerçant dans la ville de Maroua. Ces condamnations à la peine de mort interviennent dans le cadre de la lutte contre le terrorisme que mène le Gouvernement camerounais.

L’homme de loi qui fait partie des 7 seuls avocats exerçant dans la Région où sévissent les attaques de la secte islamiste Boko Haram déplore les conditions dans lesquelles ces condamnés, parmi lesquels «plusieurs innocents» sont jugés. Selon lui, les dossiers de défense  de ces derniers sont laissés à des avocats stagiaires commis d’office par les tribunaux moyennant une rémunération de 5 000 Francs CFA par accusés. La plupart de ces avocats désignés par le Commissaire du Gouvernement n’arrivent même pas à  accéder aux dossiers de procédure ou à rendre visite à leurs clients. «Ces condamnés n’ont aucun contact avec leurs familles, avocats et médecins», regrette Maitre Mohamad Al Amine.

Humanisme

Le Gouvernement, apprend-on, n’a jamais produit de témoin à l’accusation. «A chaque fois, ils évoquent des témoins incarcérés à Yaoundé», a ajouté le militant des Droits de l’homme. Sur le cas du correspondant de  RFI, Ahmed Abbas, arrêté le 30 juillet 2015 à Maroua, il explique  que ce dernier a fait 40 jours sans que personne ne sache où il avait été conduit. «Issa Tchiroma avait dit que son avocat aurait accès à lui lorsqu’on aura fini de l’exploiter, de l’interroger», a déploré l’avocat qui appelle à plus d’humanisme dans le traitement infligé aux personnes condamnées à mort dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

«Je m’adresse principalement aux magistrats qui sont en charge des dossiers de terrorisme dans l’Extrême Nord parce qu’eux, ce sont des juristes qui peuvent appliquer la loi avec beaucoup d’humanisme. Nous n’allons pas contester la loi qui a été votée par le Parlement. Cependant, les juges peuvent appliquer cette loi avec beaucoup d’humanisme au lieu de la sévérité que nous constatons jusqu’à présent», a-t-il souhaité.

Ce témoignage sur le mauvais traitement des condamnés à mort dans la Région de l’Extrême-Nord a été fait au cours du lancement des activités du Réseau des avocats camerounais contre la peine de mort au Cameroun (RACOPEM), le 20 août 2016 à Limbe. Les membres de ce réseau souhaitent porter le combat pour l’abolition de la peine de mort au Cameroun. Pour eux, ce type de condamnation viole non seulement la Constitution du Cameroun et  les traités internationaux signés par le Gouvernement mais aussi n’est pas efficace pour dissuader les criminels.

«Il n’a jamais été démontré que la peine de mort est dissuasive. Elle est injuste et n’apporte pas plus de solutions pour les familles de victimes», a rappelé maitre Nestor Toko, président du réseau. Présent à cette première assemblée générale, Maitre Junior Eta Besong, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun a appelé ses collègues à mener ce combat avec courage et abnégation.

 

Auteur:
Wiliam TCHANGO
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