Cameroun - Musique/Sally Nyolo (artiste musicienne): «Je ne connais pas les artistes qui sont boycottés et ceux qui les boycottent. Moi, on ne m’a jamais boycottée»

Par Fred BIHINA | Cameroon-Info.Net
YAOUNDE - 24-May-2019 - 11h56   8484                      
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l'artiste Sally Nyolo archives
Dans une interview fleuve accordée à Mutations en kiosque le 23 mai 2019, la chanteuse de bikutsi sert un tacle appuyé aux nouveaux ambassadeurs de ce rythme musical. Elle revient aussi sur sa comédie musicale en préparation et le mouvement de boycott de certains artistes lancé par des Camerounais de la diaspora.

Cameroon-Info.Net vous propose des passages de cet entretien:

Question: Qu’est-ce qui fait votre actualité artistique en ce moment?

Sally Nyolo: Actuellement, je suis en studio pour un nouvel opus. Mais je suis au Cameroun pour combattre le mariage précoce des enfants. Je suis ambassadrice de l’UNICEF depuis 2016 et depuis cette année-là, je suis très présente au Cameroun pour lutter contre le mariage précoce des enfants, pour rencontrer les artistes et surtout pour mener à bien une grande entreprise qui est la réalisation d’une comédie musicale, afin d’aller au plus près du public en passant par les institutions.

Question: Depuis le début de votre carrière, vous vous êtes produites dans plusieurs continents. Quelle scène vous a le plus marquée?

Sally Nyolo: Ce n’est malheureusement pas une scène africaine… La scène la plus importante pour moi a été la scène où j’ai joué avec Maceo Parker, James Brown et il y avait devant nous plus de 70 000 personnes. Ils ont acheté tous mes CD et à la fin du concert, ils ont enlevé leurs t-shirts et m’ont demandée de signer sur leurs corps avec des feutres indélébiles. La scène s’est produite au Danemark. Un autre souvenir impérissable, c’était en Belgique lorsque j’ai vu des enfants peindre leurs mains en bleu et ils ont fait une haie depuis la scène jusqu’à la loge pour m’attendre. Alors que je chantais en Eton, en Fang, en nos langues, ces enfants ont secoué leurs mains pour me dire que je leur avais donné l’occasion de penser qu’il n’existe pas de couleurs entre les humains. La culture n’a pas de couleur, c’est la vibration qu’on donne à l’autre qui compte.

Question: Quelles appréciation faites-vous de la scène artistique camerounaise actuelle? Quelles sont les jeunes qui vous marquent? On présente d’ailleurs certains comme vos héritiers.

Sally Nyolo: Je ne les connais pas. Je ne vis pas au Cameroun et là où je vais, je ne les rencontre pas. Ce que vous appelez bitkutsi, je ne me reconnais pas dedans. Ce sont des boîtes à rythme. Je n’ai jamais entendu quelqu’un taper le gouffre comme mois. Si j’ai des héritiers, qu’on me les montre. Je suis désolé, mais je n’ai jamais joué avec une boîte à rythme. Avec tout le potentiel que nous avons ici, les artistes devraient être permanemment en pleine recherche parce que la musique est une science. Ils devraient tous chercher comment dominer le monde extérieur au lieu de chercher à s’uniformiser. Ne me comparez-pas. Le travail de l’artiste, c’est d’essayer de convertir son art à tout moment. Tout est musique et la musique est partout. A nous d’être conscients de ce que nous voulons donner. Je fais de la musique et non du bikutsi. Je reconnais avoir fait quelque chose du bitkutsi original avant qu’il ne soit emprisonné dans les boîtes à ryhtme.

Question: 37 ans de carrière déjà et toujours au top. Quel est votre secret?

Sally Nyolo: J’aime mon travail et tout le monde le sait. Si on demande cinq noms de chanteuses en Afrique, mon nom sera certainement cité.

Question: Que pensez-vous de la gestion des droits d’auteur au Cameroun?

Sally Nyolo: Depuis le début, je n’ai jamais rien au Cameroun en parlant des droits d’auteur. Je me suis pourtant affiliée à toutes les sociétés de gestion des droits d’auteur depuis la première.

Question: Comment appréciez-vous le mouvement de boycott de certains artistes à l’international?

Sally Nyolo: Je ne saurai quoi répondre parce que je ne connais pas les artistes qui sont boycottés, car nous ne surfons pas dans le même milieu. Je ne connais pas non plus ceux qui les boycottent. Moi en tout cas, on ne m’a jamais boycottée.

Question: A votre avis, un artiste devrait-il exprimer ses opinions politiques?

Sally Nyolo: Rien ne l’en empêche. Un vrai artiste est d’abord un humaniste, il est la voix du peuple, il arrive à transcender ce que le peuple ne peut pas dire. Un artiste qui représente son peuple, c’est quelqu’un qui dit tout fort ce que les autres pensent tout bas. Moi par exemple, je défends la cause féminine depuis le début de ma carrière… Je fais la politique pour le Cameroun, pour l’Afrique, pour les femmes, pour les enfants. Je fais la politique pour que l’Afrique sorte d’où elle est et ait plus de considération, mais également pour que les artistes puissent vivre de leur art.

Fred BIHINA

 

Auteur:
Fred BIHINA
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