Cameroun - Politique: Pour Christopher Fomunyoh, au Cameroun, «on n’est pas à l’abri de l’irruption d’une crise majeure»

Par Otric NGON | Cameroon-Info.Net
YAOUNDE - 27-Jun-2016 - 15h38   51743                      
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Christopher Fomunyoh Archives
Cadre supérieur et Directeur régional pour l'Afrique au National Democratic Institute for International Affairs, il dévoile ses craintes sur la stabilité du Cameroun dans une interview accordée à Jeune Afrique.

Christopher Fomunyoh pense que le Cameroun va mal. Le natif de Guzang, dans l’arrondissement de Batibo (Nord-Ouest), aujourd’hui Directeur régional pour l'Afrique au National Democratic Institute for International Affairs (Institut national démocratique pour les affaires internationales, NDI), un think tank américain idéologiquement lié au Parti démocrate, estime que les Camerounais vivent dans la morosité et à la frustration.

Dans une interview accordée au magazine panafricain Jeune Afrique après un séjour au Cameroun et au Gabon, il expose ses craintes: «le pays ne va pas bien du tout. Je l’ai traversé de long et en large. Pas une région n’échappe à la morosité et à la frustration. Les gens ne se sentent pas écoutés… Si vous ajoutez à cela le climat créé par les multiples appels au Président Paul Biya à se représenter, je dirais que le feu couve sous les cendres. On n’est pas à l’abri d’une surprise: l’irruption d’une crise majeure dans ce calme trompeur».

«Dans de nombreux domaines, le pays boitille. L’exécutif concentre tous les pouvoirs, comme l’y autorise la Constitution. Le législatif et le judiciaire ne fonctionnent plus, et les citoyens ne leur font pas confiance pour les représenter. Il faudrait un rééquilibrage. Sur le plan économique, au regard des ressources naturelles et humaines, le Cameroun ne tient pas ses promesses. Il y a un fossé entre les discours affichés et les moyens mis en œuvre. Alors qu’on voudrait attirer les investisseurs, il n’y a pas d’infrastructures appropriées pour des activités économiques de grande envergure», poursuit-il.

Des griefs portés à l’endroit des dirigeants qui, selon lui, ne font rien pour changer les choses. «Le Cameroun semble à l’arrêt. Personne ne prend de décision. Ou alors «sur haute instruction» d’un seul individu. Cela n’est pas de nature ni à attirer les investisseurs, ni à créer les conditions d’emploi pour la jeunesse, ni même à inspirer cette dernière, qui a besoin de modèles pour se tourner vers l’entrepreneuriat. Le Cameroun dispose de tous les atouts nécessaires pour se poser en pays phare en Afrique. Devoir se mesurer à la Guinée équatoriale et au Congo-Brazzaville en dit long sur son état de décrépitude. Il n’est pas exclu que les Chefs d’État voisin s’interrogent sur cette descente aux enfers camerounaise», explique-t-il.

A la question de savoir si les autorités envisagent l’alternance politique, le docteur en sciences politiques de l'Université de Boston (États-Unis, 1993) rétorque sans ambages: «Le système repose sur un seul individu. Si Biya était suffisamment bousculé, il pourrait l’envisager, organiser des élections démocratiques, transparentes et crédibles. Il dispose de tous les outils de pouvoir pour freiner cette alternance s’il ne la désire pas. Reste à savoir si pareille position est tenable sur la durée».

Pour sortir de cette situation morose à laquelle les citoyens ne s’y reconnaissent pas, et éviter une crise majeure dans le pays, Dr Christopher Fomunyoh pense qu’«il faut des discussions plus ouvertes, qui associent les citoyens. C’est le sentiment d’être tenus à l’écart qui pousse les gens dans la rue». Un message qui résonnera peut-être dans les oreilles des dirigeants de son pays, le Cameroun.

Auteur:
Otric NGON
 @OtricNgonCIN
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