Estampillage - Vignettes sur alcools et tabacs: Plaintes des opérateurs économiques

Par Muna Dimbambe | Aurore Plus
Douala - 27-Jan-2013 - 08h30   50061                      
0
En dressant un véritable réquisitoire des défaillances enregistrées depuis le lancement de l’opération d’apposition des vignettes sur certains produits de consommation courante, les opérateurs économiques des différentes filières y assujetties remettent en cause son bien fondé.
I- Récriminations Les membres du Syndicat national des importateurs camerounais ne décolèrent pas. L’opération d’apposition des vignettes sur les alcools et tabacs qui avait pourtant été saluée à sa juste valeur par les opérateurs économiques à son lancement, ne résout malheureusement pas les problèmes qui avaient constitué la trame de sa mise en branle. Et pour cause, les produits de la contrebande continuent toujours d’entrer dans le territoire national sans trop de difficultés. Il en est ainsi notamment des centaines de cartons de produits divers en provenance de Guinée Equatoriale saisis récemment par la délégation régionale du commerce du littoral et sans vignette aucune. Pourtant lors du lancement de l’opération y afférente, les responsables du Ministère des Finances avaient laissé entendre que celle-ci avait été initiée dans le but de lutter contre la fraude, la contrefaçon et la contrebande. Mais également, protéger la santé des consommateurs, améliorer la compétitivité des entreprises locales et sécuriser les recettes fiscales et douanières. Mais 06 mois après son lancement, ces maux continuent de plomber aussi bien les recettes douanières que de mettre à mal les opérateurs économiques. Ces derniers estiment en effet que cette opération a plutôt porté un sérieux coup à leurs activités. Et c’est à juste titre que le syndicat national des importateurs camerounais, a dressé un véritable réquisitoire des défaillances enregistrées depuis son lancement. Le document que ledit syndicat compte déposer sur la table des autorités administratives en charge de ce dossier, fait état de ce que la sélection qui a abouti au choix de ces produits a été guidé par la volonté de certaines personnes d’écarter les opérateurs économiques locaux. Ils se fondent sur le fait qu’au lancement de cette opération les produits les plus dangereux pour la santé n’ont pas été pris en compte. A l’instar des aliments, des produits pharmaceutiques, les cosmétiques et les compléments alimentaires, pour ne citer que ceux-là. Ce d’autant plus que, «la lutte contre la fraude passe avant tout par l’égalité des importateurs devant les impôts». Aussi ont-ils relevé de nombreuses discriminations sur les tarifs applicables suivant les importateurs. Pour eux, certains bénéficient depuis belle lurette des valeurs transactionnelles (valeur de la marchandise à l’achat) refusées pourtant aux importateurs locaux des mêmes produits. Il s’agit singulièrement de Guinness Cameroun, des Brasseries du Cameroun, et de British American Tobacco. Pour développer leur argumentaire, ils arguent que les multinationales qui font dans l’alcool, ne posent pas la vignette sur bières, quelques soient produites localement ou pas. «Cette exigence eût permis à notre administration fiscale de se faire une idée sur le volume des ventes de ces multinationales et éviter les lourdes pertes déclarées sur des bases non vérifiables, à l’instar de BAT qui déclare environ dix milliards de F Cfa de pertes nonobstant le monopole de fait concédé par l’Administration». L’Administration douanière n’est pas en reste. D’après eux, c’est elle qui favorise la contrebande en prévoyant des tarifs plus bas pour des produits identiques aux opérateurs qui empruntent les frontières autres que Douala; ceci justifie le recours à ces pistes et points par les trafiquants qu’on incitera une fois sur place à négocier. Pour ce qui est de la loi de finances 2009, ils soulignent qu’elle a institué un mode de calcul des droits d’accises et de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Il se trouve malheureusement que ces dispositions sont ignorées par les Douanes camerounaises qui en gonflant artificiellement les droits, poussent les opérateurs dans le maquis. Pour ce qui est de la vignette, on n’a rien prévu pour les produits qui passent par les ports secondaires et autres postes douaniers frontaliers. Ce qui favorise la contrebande. II- Mesure controversée Dans les faits, on constate donc que les vignettes prêtent à spéculation au détriment de l’Etat qui perd des recettes fiscales. D’après les mêmes sources, le prix de la vignette qui est de 5 F Cfa (prix homologué), se revend entre 200 F Cfa et 300 F Cfa sur le marché noir, en fonction de la demande. Une activité qui, on le veuille ou pas, pousse les consommateurs à s’abreuver aux produits d’origines douteuses. « Il a également été établi, au cours de ce travail que le prix de vente moyen d’une vignette se situe autour de 2,50 F Cfa l’unité auprès des entreprises concurrentes, alors que celle qui est vendue officiellement par l’administration à 5 F Cfa, soit une marge bénéficiaire de 100%». Des goulots d’étranglement ont été organisés par l’administration fiscalo-douanière qui, dans la précipitation, a dégagé un espace insignifiant pour l’estampillage. Ce qui fait que les opérateurs économiques qui ont accepté de se livrer à cette expérience, ont de la peine à estampiller convenablement leurs produits. On se souvient d’ailleurs que le Ministre des Finances, au cours d’une de ses visites, constatant de visu cet espace, s’était offusqué de son rétrécissement. Il suffit de descendre sur les lieux en permanence embouteillés par des dizaines de manutentionnaires qui dépotent les conteneurs, puis les cartons pour apposer manuellement les vignettes, pour s’en rendre compte. La solution préconisée par les Douanes camerounaises, à savoir les faire apposer par le fournisseur à l’Etranger, à en croire certains opérateurs économiques, ne prospère pas, compte tenu de l’étroitesse du marché local, qui est insignifiant avec le développement des échanges aujourd’hui. Ces marchés qu’on qualifie de marginaux, comme celui du Cameroun, sont alimentés par des centrales d’achats européens, asiatiques et américains. La manipulation de ces timbres n’est pas aisée, passant par des dépotages des conteneurs, puis des cartons, l’estampillage et le reconditionnement; Beaucoup de casses et d’avaries des emballages sont relevées. Les délais d’attente sont exponentiels et profitent à la contrebande. Aussi ont-ils fait des propositions pour diluer les récriminations. Selon eux, il eût suffi de baisser la pression fiscale à l’instar de ce qui se passe autour de nous, en Cemac, à la Cedeao, pour relever de manière substantielle le niveau des recettes douanières. «En raison de la porosité des frontières et des accords communautaires, bientôt les produits venant des pays étrangers vont envahir nos marchés et pousser à la ruine les opérateurs économiques. La seule solution résiderait probablement dans la délocalisation vers nos voisins, au détriment des emplois et de la lutte contre la pauvreté. Si rien n’est fait dans le sens de l’amélioration de cette situation…».




Dans la même Rubrique