Extrême Nord : le Minproff s’attaque à l’excision

Par Olivier LAMISSA KAIKAI | Cameroon Tribune
- 14-Oct-2008 - 08h30   52190                      
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Lors de sa récente visite de travail, le ministre Suzanne Mbomback a exhorté les chefs traditionnels à combattre ce fléau.
«Mme le ministre, les femmes sont confrontées aux problèmes de l’excision, des mariages précoces et forcés, au difficile accès aux crédits et aux droits fonciers... » Mme Aissatou Boubakary a crevé l’abcès en dénonçant publiquement les difficultés de la femme rurale à l’occasion de la visite du ministre de la Promotion de la femme et de la Famille (Minproff) à Mora, le 8 octobre 2008. Les propos de la présidente du réseau des associations des femmes du Mayo-Sava sont un véritable pavé dans la mare. Et pour cause ! L’excision, les mariages précoces et forcés, les droits de la femme aux titres fonciers… sont des sujets tabous, sensibles dans cette partie du pays, viscéralement attachée à certaines coutumes traditionnelles. En parler en public relève de l’extraordinaire. Et Mme Mbomback est montée au créneau pour dénoncer ces pratiques dont sont victimes ses filles, sœurs et mères de cette partie du pays. Le ministre en a fait le principal objet de sa visite. Au point de reléguer au second plan l’inauguration du Centre de promotion de la femme de Mora et l’installation de son nouveau directeur. Mais, l’essentiel de cette cérémonie a tourné autour des sujets qui fâchent. Dans un langage clair et dépouillé de toutes fioritures, Suzanne Mbomback a fustigé l’excision et les mariages précoces et forcés, pratique en cours dans certains villages des départements du Mayo-Sava, Logone et Chari. « Les femmes sont fatiguées d’excision. Arrêtez ces pratiques qui déshonorent la femme et conduisent à la mort ! Laissez les filles grandir, envoyez-les à l’école et non en mariage ! », a clamé le ministre devant une foule médusée. Lors de la séance restreinte de travail avec les chefs traditionnels, on a senti la gêne des autorités traditionnelles à aborder ces sujets en public. Si certains chefs ont nié l’existence de ces pratiques dans le département du Mayo-sava, d’autres ont néanmoins reconnu que l’excision est une pratique culturelle de l’ethnie arabe-choa, peuple minoritaire dans ledit département. Les femmes qui ont pris part à cette réunion ont relevé que les exciseuses ont changé de méthode et exercent désormais dans la discrétion à l’insu des pères de famille. « Tout se joue entre la grand-mère et la mère de la fille à exciser », a révélé Mme Mamah Amazia. Au bout d’une discussion de près d’une heure du temps, le ministre a sollicité l’implication des autorités traditionnelles pour sensibiliser les populations et endiguer les poches de résistance. Au troisième jour de sa visite, le Minproff a rencontré certaines exciseuses à Kousseri et Maltam, à qui elle a réclamé leurs couteaux d’excision. Elle a réceptionné au total deux couteaux dans la ville de Kousseri. Dans cette région, l’excision reste un phénomène culturel, difficile à éradiquer.




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