Intox: L’Affaire Wome Nlend

Par Bertille M. Bikoun | Mutations
- 13-Oct-2005 - 08h30   67161                      
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La maison et la voiture ont-elles été cassées ? La famille a-t-elle été violentée? D’où est partie la désinformation de l’Afp? L’enquête de la rédaction et l’interview du défenseur des Lions indomptables
Désinformation: Fiction autour des malheurs de Womé -------------------------------------------------------------------------------- Contrairement à ce qui se dit depuis dimanche dernier, la maison du joueur de l’équipe nationale n’a pas été saccagée. -------------------------------------------------------------------------------- Vêtu du maillot rouge de Barcelone, Veron Wome, le frère cadet de Pierre Wome Nlend, répond sans équivoque: «Il n’y a rien eu. La maison n’a pas été attaquée. Personne n’a été touché». Comme pour confirmer ses dires, la voiture noire de marque Mercedes que l’on annonçait également détruite, brille sous le soleil. Intacte. «Regardez vous-même, dit-il en indiquant du doigt le véhicule garé dans le parking du domicile familial du joueur, est-ce que vous voyez quelque chose ? Vous pouvez aller vérifier, elle n’a subi aucun dommage». Au lendemain du match Cameroun-Egypte de samedi dernier qui s’est soldé par la non qualification des Lions indomptables, des rumeurs ont fait état de ce que «des supporters ont saccagé la maison familiale [de Womé] au quartier Nsam, cassé la voiture Mercedes du footballeur et même le salon de coiffure de sa copine». L’information relayée par une dépêche de l’Afp a été reprise dans l’édition en ligne du quotidien français Le Monde du lundi, 10 octobre 2005, et sur Radio France internationale, dont le correspondant a fait tout un «reportage». En fait de copine, il ne s’agirait, selon Veron Womé, que «d’une amie et bonne supportrice de Pierre qui est installée au quartier Anguissa» à Yaoundé et dont il ne souhaite pas révéler l’identité. Qu’a-t-elle donc eu éventuellement ? Dans sa dépêche, en effet, le journaliste de l’Afp cite, sous le couvert de l’anonymat, un «cousin» de Wome Nlend. D’après ce supposé proche parent du footballeur cité par l’Afp, «chaque fois, il s’agissait de bandes de jeunes vraiment déterminés à en finir avec Pierre Womé [...] Aucun membre de la famille n’a été blessé, simplement parce qu’il n’y a eu aucune riposte». Arguments Aucune trace de dommage n’est visible sur le mur de couleur jaune servant de clôture au domicile Wome au quartier Nsam. Le portail en fer, d’un blanc quelque peu défraîchi, ne présente également aucun signe de vandalisme. A l’intérieur de la maison, chaque meuble et bibelot semblent être à sa place. Bref, à en croire Veron Wome, tout est calme. «Que ce soit ici ou dans les autres maisons de Pierre. Comment est-ce que les gens auraient pu savoir qu’il possède des maisons à Bastos ? Même si tel est le cas, ces maisons sont en location et je puis vous assurer qu’il ne s’y est rien passé.» Que s’est-il exactement passé ce samedi 8 octobre 2005 ? En allant au stade ce jour-là, Veron Wome déclare qu’il a laissé «des gens à la maison qui ont préféré regarder le match à la télévision». Après le match, le jeune garçon affirme être revenu à la maison vers 19h, où il n’a rien remarqué d’anormal. «Mais certaines personnes m’ont dit qu’il y a eu des gens qui en voulaient à Pierre Womé d’avoir manqué le penalty de la qualification, et ont menacé de casser la maison». Toutefois, il ne s’est rien passé. «Des éléments de la police, six au total, sont venus nous retrouver». Sans dire à quelle unité ils appartenaient, ces derniers auraient rassuré la famille qu’ils sont venus nous protéger. Certains de ces policiers seraient d’ailleurs restés en poste jusqu’à une heure tardive de la matinée de dimanche. Rfi et Afp Au cours d’une conférence de presse qu’il a donnée mardi, 11 octobre 2005 à Appiano Gentile (Nord de l'Italie), le centre d'entraînement de son club, l'Inter Milan, Pierre Womé Nlend affirme, selon le site Internet du journal Le Monde, que «Avant de rentrer aux vestiaires à la fin du match, j'ai demandé à la police comment allaient mes proches. On m'a répondu qu'on se chargeait de leur sécurité. Des supporteurs ont certes causé des dégâts matériels mais le plus important c'est que ma famille aille bien» Contacté par téléphone, le correspondant de l’Afp et de Rfi au Cameroun, David Ndachi Tagne, dit avoir été approché le soir du match par le bureau de l’Afp à Paris, qui l’aurait informé de ce que «la maison de Pierre Wome Nlend avait été incendiée». Il affirme avoir recoupé cette information auprès du ministère des Sports et de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot). Des sources qui, dit-il, ont confirmé l’information selon laquelle «la maison de Wome avait été saccagée et le véhicule Mercedes de son frère endommagé» après le match Cameroun-Egypte. Une information, poursuit Ndachi Tagne, que ces personnes ressources déclaraient «tenir d’un membre de la famille du joueur». Le journaliste a-t-il contacté lui-même la famille du joueur pour en savoir davantage? Pour Veron Wome, la réponse est non! Polémique: Qui devait tirer le penalty ? -------------------------------------------------------------------------------- Eto’o accuserait Wome de l’avoir empêché de frapper le penalty sifflé en faveur du Cameroun à la 94ème minute. -------------------------------------------------------------------------------- "Personne ne voulait tirer ce penalty. Personne. Ni Eto'o (Samuel), ni notre capitaine (Rigobert Song), parce qu'ils savaient ce qui pouvait arriver s'ils le rataient. J'ai eu le courage de me présenter au point de penalty", a déclaré Pierre Womé à Appiano Gentile (Nord de l'Italie), lors d’une conférence de presse qu’il a donnée mardi 11 octobre 2005, au centre d'entraînement de l'Inter Milan, son club, et relayée par le journal Le monde dans son édition en ligne du lundi, 10 octobre 2005. Pierre Wome Nlend répondait à une polémique que la presse attribue à son coéquipier du Fc Barcelone (Espagne). Samuel Eto'o aurait déclaré, en effet, à la presse espagnole que Pierre Wome Nlend l’a empêché de tirer le penalty sifflé en faveur du Cameroun lors de la rencontre qui a opposé les Lions indomptables, samedi dernier, au Pharaons d’Egyptes dans le cadre de la 10ème journée des éliminatoires combinées Coupe d’Afrique des nations/Mondial 2006. «J'allais me saisir du ballon quand Wome m'a appelé et m'a dit qu'il se sentait très confiant dans le fait qu'il allait marquer», a déclaré l'attaquant du Barça à plusieurs journaux espagnols, selon le quotidien sportif français L’Equipe dans son journal en ligne et plusieurs agences de presse. «Je ne comprends pas pourquoi mon coéquipier (Eto'o) a dit ça. C'est toujours facile de parler après-coup. J'étais parmi les joueurs susceptibles de tirer les penalties avec Eto'o et Geremi, qui était suspendu», s’est indigné le défenseur de l’Inter Milan dans un article publié par le quotidien français, Le Monde, sur son site Internet. Indignation Suite à un acte d’anti-jeu d’un joueur égyptien sur la personne de Salomon Olembé, l’arbitre central de la rencontre de samedi dernier, le Malien Coulibaly Koman, siffle un penalty en faveur des Lions indomptables à l’ultime minute de jeu (94e mn). Tous les Camerounais sont dans la surface de buts adverse. Au lieu de se saisir du ballon, Song et Eto’o vont plutôt aller consoler le gardien égyptien, qu’ils conduisent dans sa cage. Après un moment d’hésitation, Pierre Womé Nlend se pointe et frappe le ballon avec puissance. Si le défenseur prend à contre pied le gardien de buts, le ballon heurte violemment le poteau droit de la cage égyptienne. «[...] Ce qui me déçoit le plus, c'est ce qu'un de mes coéquipiers -Samuel Eto'o- a dit, après tout ce qui s'est passé. Je ne peux pas le tolérer. A Sydney en 2000, j'ai tiré le dernier tir au but de la finale olympique. Je l'ai marqué et nous sommes devenus champions olympiques», s’indigne alors Pierre Womé, d’après Le Monde. Même si Samuel Eto’o aurait par la suite tenté de se rattraper: «Il faut accepter ce genre de choses [...] Je suis triste pour mon pays, mes équipiers et moi-même», a ajouté Eto'o d’après L’Equipe, dont la sélection nationale ne s’est pas qualifiée pour le prochain mondial, après le nul concédé face à l’Egypte (1-1). B.M.B




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