Réaménagement: Pourquoi le Sdf n’est pas entré au gouvernement

Par Franck ESSOMBA | Le Messager
- 11-Sep-2007 - 08h30   54943                      
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Le gouvernement réaménagé ne compte en son sein aucun militant déclaré du Sdf. Plusieurs raisons expliquent cette absence.
Dans son édition du vendredi 17 août 2007, Le Messager annonçait à sa “ une ” que le Front social démocrate (Sdf, en anglais) acceptait la main tendue de Paul Biya, pour la formation d’un gouvernement intégrant toutes les forces politiques au Cameroun. Cette information a suscité étonnement et interrogations dans l’opinion. Certains croyaient en effet que, dès la première retouche de l’appareil gouvernemental, des militants du Sdf feraient désormais partie de l’exécutif. Mais le parti de Ni John Fru Ndi est absent du gouvernement réaménagé vendredi 7 septembre. Du coup, une question revient : pourquoi le Sdf n’est finalement pas entré au gouvernement ? Pour identifier les raisons d’une telle absence, il est sans doute nécessaire de scruter le contexte. Au cours d’un point de presse à Douala le 16 août, Ni John Fru Ndi affirme que le dessein de tout parti politique est de gouverner. Mais “ en notre qualité de social-démocrate, nous n’entrerons au gouvernement que sur la base du manifeste que nous avons vendu aux Camerounais ”, indique-t-il. L’idée de faire partie du gouvernement est ainsi acquise, même si elle l’est sous conditions. “ Si je dois entrer au gouvernement pour travailler à ma façon, je suis d’accord. Autrement, il n’en est pas question ”, martèle Fru Ndi. Le clin d’oeil Le point de presse du leader du principal parti de l’opposition politique camerounaise depuis 1990 a ainsi lieu trois jours après le discours de Paul Biya, chef de l’Etat et président national du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) au pouvoir. Alors que les résultats des législatives et municipales du 22 juillet viennent d’être publiés, le président de la République affirme, le 14 août, que “ les partis qui n’ont pas obtenu les résultats escomptés ne doivent pas pour autant se sentir exclus de la vie politique. ” Mieux, il pense que “ l’intérêt supérieur de notre pays exige le plus large rassemblement possible de tous ceux qui sont déterminés à mettre leur énergie et leur talent au service de notre combat contre le sous-développement et la pauvreté. ” Une indication claire qu’il veut ouvrir la composition du gouvernement aux forces politiques présentes sur le territoire national. La réaction de Fru Ndi est alors perçue comme une acceptation de cette main tendue de Paul Biya. Surtout que, en 1997, des plénipotentiaires de ce parti avaient assidûment négocié leur entrée au gouvernement après les législatives et la présidentielle de cette année-là. Les négociations avaient échoué. A cette époque, le Sdf comptent 43 sièges à la représentation nationale. Aujourd’hui il n’en a encore que 14 sur les 163 députés déjà élus. Mais le parti n’en demeure pas moins la deuxième force politique au parlement. Logiquement, un nouveau gouvernement qui prendrait en compte la volonté du peuple exprimée à travers l’élection des députés accorderait une place de choix d’abord au Sdf. Les déclarations de Fru Ndi sont dès lors perçues comme une préparation de l’opinion aux décisions qui seront prises dans les jours qui suivent. Après la rencontre avec la presse, l’on apprend justement que des médiateurs – dont un homme de Dieu – sont en pourparlers avec le Rdpc pour la participation du Sdf au futur gouvernement. Que s’est-il donc passé ? Le jeu reste ouvert Le premier élément de réponse semble être la nature des actes du chef de l’Etat vendredi dernier. Il n’y a pas eu formation d’un nouveau gouvernement – comme on s’y serait attendu dans une démocratie après les élections – mais un réaménagement du gouvernement. Cela signifie que le président a voulu résoudre un problème ponctuel, une menace imminente. Le deuxième élément de réponse est probablement lié au blocage de la négociation. Des sources concordantes ont en effet indiqué à la rédaction du Messager que le Rdpc n’est pas d’accord avec les exigences conditionnant l’entrée du Sdf au gouvernement. Parmi ceux-ci, l’exigence de certains portefeuilles-clés (Administration territoriale et Justice), le vote d’une loi portant statut du leader de l’opposition qui bénéficierait d’émoluments subséquents, l’application d’un programme propre, etc. On se rappelle par ailleurs que John Fru Ndi a indiqué au point de presse du 16 août que ses conditions sont, entre autres, un système socialiste, un gouvernement tourné vers le peuple, la mise en place du fédéralisme, … Dans son analyse, Le Messager se demandait déjà si le pouvoir pourrait accepter le manifeste du Sdf. Des indiscrétions annoncent que le chef de l’Etat souhaite, au cas où il proposerait la modification de la Constitution, avoir le moins de protestation possible, tant à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur du pays. Les jeux restent donc ouverts. Mais l’entrée du Sdf au gouvernement signifierait probablement la mort d’une certaine opposition opiniâtre dans ses revendications pour l’amélioration des conditions de vie des Camerounais.




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