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Lactualité nationale gravite ces derniers temps autour du président de la République. Deux faits majeurs à relever: l’inauguration de l’exploitation du pipeline Tchad-Cameroun et surtout la rumeur sur la mort de M. Paul Biya, objet exclusif de votre revue de presse de cette semaine.
La folle rumeur sur la mort de M. Biya finalement dissipée
Alarmant au départ, le potin sur le décès du président de la République s’est retourné à l’avantage de la victime.
Rappel des faits
Tous les recoupements faits, il se trouve que dès le jeudi 3 juin 2004, la rumeur circulait déjà à Yaoundé. Le président de la République était donné pour mort. De bouche à oreille et avec le concours du téléphone portable, la nouvelle s’est propagée aux quatre coins du monde. Ce n’est que le dimanche 6 juin, à 13 heures, que le secrétariat général de la présidence de la République a fait diffuser à la radio et la télévision nationales (CRTV) le démenti officiel.
Porté en «triomphe» mercredi dernier à Yaoundé, et largement ovationné à son retour d’un bref séjour privé en Europe, comme l’indiquent Cameroon Tribune et The Herald, M. Paul Biya, «le fantôme», a fait retomber les passions qui se sont tissées autour de la «mauvaise blague» La presse dans son ensemble a commenté à suffire ce passage de la déclaration de «l’homme-Lion» à l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen: «Apparemment, il y a des gens qui s’intéressent à mes funérailles. Eh bien, dites-leur que je leur donne rendez-vous dans une vingtaine d’années». Thierry Ngogang du quotidien Mutations va plus loin et précise que «Paul Biya a récupéré la rumeur. Sans goûter à la plaisanterie, le chef de l’Etat a retourné la situation à son avantage». Au-delà du caractère festif de l’accueil observé dans la capitale au retour du coupe présidentiel, on peut, logiquement, adopter la démarche analytique de Christophe Mien Zok du journal L’Action pour revenir sur certaines «questions de sens» relatives à la folle rumeur.
Sur les origines de la rumeur
Si d’après une source exclusive de La Nouvelle Expression, «la rumeur aurait sérieusement fait rigoler le locataire d’Etoudi», il convient de souligner toutefois que la presse nationale est formelle sur les origines de la rumeur: «La nouvelle est venue de l’extérieur». A ce sujet d’ailleurs, Christophe Mien zok de L’Action apporte la précision suivante: «Si le site de Ndzana Seme a été bel et bien identifié comme la source médiatique de la rumeur, il n’est pas certain qu’il en soit l’auteur. Les regards convergent alors vers ce qu’il convient d’appeler l’entourage du chef de l’Etat. Il est tout à fait possible que dans ces multiples cercles pas toujours concentriques, quelqu’un quelque part a dû manquer à la fois de sang froid, de vigilance et a balancé par maladresse, par inadvertance, par ignorance ou sciemment une information dont il ne soupçonnait pas la gravité, le cheminement et les conséquences».
Sur la traitement médiatique
A quelques nuances près, Jean Vincent Tchienehom du Messager et T. Ngogang de Mutations estiment que face à la crise, la communication gouvernementale n’était pas appropriée. L’attitude de la CRTV a laissé libre cours à toutes sortes d’interprétations. Pour sa part, L’Action démontre qu’après « les recoupements et les vérifications d’usage, les médias électroniques de service public auraient dû mettre en jeu leurs atouts - la spontanéité, la fiabilité, l’instantanéité, la fiabilité, la rapidité, la crédibilité, la couverture nationale - pour donner l’information en temps réel. Le président n’est pas mort. Le retard à l’allumage et les tergiversations ont peut-être contribué à leur manière à alimenter et à entretenir la rumeur».
A qui profite la rumeur ?
A cette question pertinente, la direction du Manidem (Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie) relayée par Le Messager répond : « Paul Biya n’a pas innové. Le président de la République a tout simplement plagié le scénario de ses pairs autocrates absolus décidés à se maintenir au pouvoir » Pour ce regroupement, le président de la République a organisé avec la complicité de l’Elysée une grotesque et burlesque mise en scène pour se sortir de sa situation politique personnelle désastreuse, faire le tri et le ménage dans son camp afin de mettre en difficulté d’éventuels concurrents, lancer une sordide campagne d’intoxication contre les ennemis de l’intérieur du Cameroun » A cette lecture, le journal de Puis Njawé vient greffer cette autre réflexion Richard Touna : l’élan du 9 juin dernier (la léthargie foraine selon ses propres termes) « ressemblait malgré tout à une opération de refondation de la sympathie entre le chef de l’Etat et une bonne frange de la population camerounaise. Le dialogue psychologique ainsi recréé entre Paul Biya et le peuple des applaudisseurs l’engage donc une rénovation de son magistère présidentiel »
« Il n’est pas mort. Soit, ajoute Henriette Ekwé de La Nouvelle Expression. Mais la rumeur du week-end dernier aura été révélatrice d’une crise politique au sommet de l’Etat qui augure d’une succession difficile en cas de malheur » Cette opinion est rapidement balayée d’un revers de la main par C. Mien Zok de L’Action. Il rappelle bien à ceux qui s’inquiètent de l’inexistence du Sénat que « L’Assemblée nationale exerce la plénitude du pouvoir législatif et jouit d l’ensemble des prérogatives reconnues au parlement jusqu’à la mise en place du Sénat » Par ailleurs la publication du comité central du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) aboutit à la conclusion que « la rumeur ne profite à personne ni au à Paul Biya, ni au Rdpc, ni au peuple camerounais (…) Même si quelques groupuscules d’activistes ont cherché à la récupérer pour créer la confusion et la haine, il convient de mettre définitivement cette affaire sur le compte d’une maladresse. Il est évident , poursuit l’auteur de l’article, que dans le sérail quelques personnes ambitieuses trépignent de plus en plus d’impatience. elles ont pu se frotter les mains et s’écrier enfin en apprenant la bonne nouvelle. Il n’est pas sûr que les pressés et les jeunes gagnent cette guerre d’usure».
Au bout du compte, reconnaît Le Popoli, le président de la République a moissonné sa mort. Yaoundé l’a porté en triomphe presque comme le feu Marco. Des meetings et marches ont été organisés dans les quatre coins du pays en son saint…nom. « Poupoul plus que vivant donne rendez-vous à ses détracteurs dans une vingtaine d’années » Fidèle à son sens poussé de l'humour , Le Popoli rapporte les décès de « Garbo Dankio (28 ans) et de Tchudom (32 ans) à Newton Aéroport (Douala). Les deux avaient parié, chacun pour l’autre, contre la mort de Poupoul. Quand il est descendu de l’avion à Nsimalen, les parieurs ont plutôt réglé l’affaire au poignard».