Cameroun: Ces freins au développement industriel des bières locales

Par Jean Daniel OBAMA | Cameroon-Info.Net
YAOUNDE - 27-Aug-2022 - 07h18   5694                      
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Bière camerounaise Archives
Selon Dr Yves Mballa Atangana, expert financier et enseignant à l’université de Yaoundé II-Soa, les opérateurs locaux doivent se mettre au niveau des bonnes pratiques et viser le positionnement de leurs produits aux standards internationaux.

« Pourquoi pensez-vous que parce que c’est une bière produite par une entreprise dont les capitaux sont majoritairement contrôlés par les nationaux, qu’on doit être moins regardant sur la qualité ? Un produit de qualité se vend tout seul ». Ce sont les propos de Dr Yves Mballa Atangana, expert financier et enseignant à l’université de Yaoundé II-Soa, dans une interview accordée à l’hebdomadaire Cameroon Business Today du mercredi 29 juillet 2022.

Selon l’expert, les bières locales souffrent encore d’un positionnement sur le marché national. L’enseignant définit d’ailleurs le positionnement comme la représentation mentale que cherche à avoir une marque ou une entreprise dans l’esprit des consommateurs, pour se démarquer de sa concurrence.

Sur le positionnement des opérateurs locaux de la bière (UCB, Brasaf, Cabra BRC Dschang, Sintieh Beer…

Dr Yves Mballa Atangana estime que, ces opérateurs bien que locaux, se positionnent comme des bières domestiques avec une forte concentration régionaliste dans le fief de leur promoteur. Ce qui selon l’expert, laisserait à penser qu’il s’agit des bières de seconde zone, en dépit de leur potentiel en dehors de l’Union camerounaise des brasseries (UCB), qui a compris l’intérêt de se vendre en dehors de l’asphère géographique de son principal promoteur, afin de se donner une identité nationale.

« Il s’agit à mon avis d’un positionnement dangereux et asphyxiant car, lorsqu’on laisse le concurrent doté de gigantesques ressources tant sur le plan quantitatif que qualitatif se mouvoir tranquillement sur l’ensemble du territoire en se focalisant sur l’aire géographique du promoteur, l’on se tire une balle sous le pied » estime l’enseignant.

Les nationaux face à la concurrence des multinationales

Les opérateurs locaux doivent se mettre à niveau des bonnes pratiques et viser le positionnement de leurs produits aux standards internationaux. Il estime que se focaliser à produire prioritairement pour la communauté d’appartenance est une très mauvaise stratégie car, elle donne l’impression d’une bière « villageoise » qui n’a d’existence que le village.

« L’expérience sur le marché des eaux minérales le démontre à suffisance car, la configuration du marché il y a 10 ans où la marque Tangui dominait largement le marché n’est plus la même avec la marque Supermont qui se retrouve depuis plus de sept ans, leader de ce marché » constate l’expert.

Il conseille aux nationaux d’avoir foi en leurs offres en proposant des produits de qualité au lieu de brandir le seul argument de la bière du pays « comme si les autres bières étaient produites hors du territoire national ».

Sur les parts des marchés des nationaux

Selon les chiffres produits par le cabinet Nielsen en 2018, la Société anonyme des brasseries du Cameroun (SABC) contrôle le marché camerounais à hauteur de 73,3%. Source du pays vient en seconde position avec 18,1%. UCB est en quatrième position avec 0,9% derrière Guiness Cameroun (3,8%) des parts du marché. En 2022 explique l’expert, la configuration du marché de la boisson au Cameroun n’a pas changé. Ce dernier s’est étoffé avec le lancement des activités d’un quatrième acteur, la société dénommée Brasseries Samuel Foyou (Brasaf).

L’accompagnement des pouvoirs publics

Dr Yves Mballa Atangana dit que l’Etat du Cameroun doit agir sur l’environnement industriel en levant un certain nombre de pesanteurs et obstacles en déployant une stratégie de mise à niveau et d’amélioration de la compétitivité des entreprises. Il préconise également une réforme de l’environnement des entreprises et des améliorations continues des systèmes de gestion qui stimulent la qualité, la productivité et la compétitivité.

Pour lui, l’Etat devrait mettre en place et assurer un accompagnement à deux volets : le premier vise à promouvoir la modernisation de l’environnement immédiat à travers le développement d’un programme national de restructuration et de mise à niveau et à l’élaboration d’un cadre juridique et d’une structure de gestion (à travers le Bureau de mise à niveau des entreprises).

Le renforcement des capacités des structures d’appui et le conseil, l’amélioration de l’infrastructure qualité (assurance qualité, certification, accréditation, métrologie), outre la création d’un fonds de mise à niveau et de modernisation de l’industrie.

Synthèse de Jean Daniel Obama

Auteur:
Jean Daniel OBAMA
 @T_B_D
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