Pr. Magloire Ondoa *, Agrégé des Facultés de Droit. : Droit d'auteur : les vérités qu'on refuse de dire

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- 05-Apr-2008 - 08h30   64350                      
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Ancien président de la Commission permanente de médiation et de contrôle des organes de gestion collective du droit d'auteur et des droits voisins, il a été démis de ses fonctions par la ministre de la Culture, Ama Tutu Muna, en début mars, et remplacé par le Pr. Adolphe Minkoa She, autre agrégé en droit.
Les anciens responsables se sont accoutumés, par peur de représailles ou espoir d'un retour aux "affaires", à répondre par un silence stoïque, aux pires injures proférées contre leur personne, leur honneur et/ou leurs œuvres. Il faut toutefois souligner que ces attaques ne sont pas légion, car rarement une autorité libérée de ses charges administratives a été aussi diabolisée ou dynamitée. La raison en est simple : La fonction appartient à l'Etat, qui peut l'attribuer ou la retirer, sans aucune obligation de justification. En conséquence, l'esprit de la démarche actuelle de la ministre de la Culture est inédit. En vouant aux gémonies son prédécesseur et les principaux collaborateurs de celui-ci, la ministre de la culture donne à voir, sous son jour le plus détestable, le spoil system camerounais. Se détournant de toute mesure, autant que des exigences de prudence, ce spoil system semble se décliner au moyen d'une approche claire : amplifier les erreurs ou fautes supposées et mettre le feu aux poudres, pour justifier les substitutions de personnes et construire son rayonnement sur les cendres de l'œuvre antérieure. Ce faisant, il découvre un acharnement et une persécution si incompréhensibles, que le devoir d'honneur m'incombe de rétablir la vérité des faits. Il ne saurait en être autrement, dès lors que, pour des raisons inavouées, au moyen d'une instrumentalisation massive des médias, l'on tente vainement de couvrir la réalité d'un voile mensonger, et de ternir l'image de personnalités, dont l'engagement au service du droit d'auteur s'est affranchi de toute borne. 1- Le monitoring de certains médias de la place, qui s'abreuvent à la seule source du MINCULT, suggère l'idée qu'avant la nomination de Madame Ama Tutu Muna, le droit d'auteur gisait dans l'obscurité et la "nébuleuse", après avoir atteint " le paroxysme de la controverse". Ce qui contredit violement le Chef de l'Etat qui, dans son interview télévisée sur "France 24", en Octobre 2007, avait qualifié de "révolutionnaire" le travail fait par l'ex Ministre d'Etat en charge de la Culture, son Excellence Monsieur Léopold Ferdinand Oyono. De même, en l'affirmant, au mépris de toute courtoisie à l'égard de cet ancien haut commis de l'Etat, ces médias mettent en porte à faux la Ministre Ama Tutu Muna avec les exigences de continuité et de solidarité gouvernementales. Au-delà, une question mérite d'être posée : Peut-on en effet sérieusement penser qu'en 25 ans de pouvoir du Président Paul Biya, il a fallu attendre l'arrivée de Madame Ama Tutu Muna au Ministère de la Culture, pour qu'"un jour nouveau se lève" (les titres des articles de presse rivalisent de talent à cet égard. Certains, par exemple, évoquent " Les prémices d'une ère nouvelle "), comme par un coup de baguette magique, sur le droit d'auteur au Cameroun ? Un regard rétrospectif conduit à une réponse négative, car il renseigne sur l'énorme contribution de l'ancien Ministre d'Etat chargé de la Culture. En effet, avant l'entrée au Gouvernement de Madame Ama Tutu Muna, Son Excellence Léopold Ferdinand Oyono, fraîchement nommé à la tête du Ministère de la Culture, trouve sur sa table de travail la délicate et épineuse question de la conception et de l'élaboration d'une politique de gestion collective du droit d'auteur, adaptée au contexte de libéralisme et aux réalités locales. Après l'échec de la gestion étatique de l'époque de la Société Camerounaise du Droit d'Auteur (SOCADRA), la Société Civile Nationale du Droit D'auteur (SOCINADA) croupissait sous le poids d'une cohorte de difficultés. Parmi celles-ci, figuraient en bonne place, la définition des rapports entre le Ministère et la SOCINADA (nature et étendue des pouvoirs du Ministère de la Culture), l'inégalité de traitement des artistes, la gouvernance financière, etc. Avec lucidité et détermination, dans un environnement hostile à toute réforme, turbulent et récalcitrant, son Excellence Léopold Ferdinand Oyono proposa la définition et l'institution d'un cadre libéral de gestion collective du droit d'auteur, caractérisé par la création de quatre sociétés de gestion collective du droit d'auteur, correspondant à chacune des quatre grandes catégories d'art. Cette initiative, qui aboutit à la loi du 19 décembre 2000, unanimement considérée comme révolutionnaire et exemplaire, offrait à chaque métier d'artiste l'occasion de prendre en main son destin. Une année plus tard, le 1er novembre 2001, et toujours à l'initiative du Ministre d'Etat Léopold Ferdinand Oyono, le Premier Ministre signa le décret d'application de cette loi. Dans la foulée, le droit d'auteur n'étant qu'un salaire accessoire et proportionnel à la production artistique et au rayonnement de l'œuvre de l'esprit, le besoin se fît impérieux d'accompagner les auteurs dans ce sens. A cet effet, le Chef de l'Etat créa un Compte Spécial d'Affectation pour le Soutien de la Politique Culturelle, qui permet au Ministère de la Culture d'octroyer des aides financières ou matérielles à la création artistique et à sa diffusion. Encore latent, ce dispositif juridique demandait à être totalement mis en activité (en fonctionnement), afin de lui permettre de produire ses effets bienfaisants sur les conditions de vie des artistes. Dans cet objectif, faisant une fois de plus preuve d'ingéniosité, et pendant qu'enflait la polémique sur l'opportunité de mettre en place un guichet unique de perception du droit d'auteur, le Ministre d'Etat Léopold Ferdinand Oyono créa, le 3 Juin 2004, la CPMC. De la sorte, il poussa la maturité de la gestion collective du droit d'auteur au Cameroun, au même niveau que celui des pays européens. Il fallait y penser ! Il fallait aussi percevoir que l'infrastructure jusqu'alors mise en place était incomplète et orpheline d'un mécanisme de médiation et de régulation. Il fallait encore, pour combler cette lacune, imaginer une structure combinant les exigences d'économie de moyens financiers, matériels ou humains et d'adaptation au contexte d'intervention. En effet, les sociétés de gestion collective du droit d'auteur sont des sociétés civiles soustraites, c'est-à-dire non soumises, à quelque tutelle que ce soit du Ministère, et le droit d'auteur n'est pas un impôt. En conséquence, les montants ou taux y afférents, ainsi que leurs modalités de perception ne sont guère unilatéralement définis. Dès lors, une médiation s'impose qui, non seulement doit rapprocher les vues des usagers et des bénéficiaires du droit d'auteur, mais aussi préserver la paix dans le milieu turbulent et bouillonnant des artistes. En même temps, un contrôle souple mais efficace, qui ne soit pas l'œuvre directe du Ministère de la Culture, s'avère indispensable à la protection de l'intérêt général. Lorsqu'elle est créée, la CPMC trouve un contexte particulièrement difficile : les droits d'auteur et connexes des artistes ne sont pratiquement pas payés depuis la dissolution de la SOCINADA ; la liquidation de cette société soulève des vagues ; les sociétés de gestion collective du droit d'auteur sont embryonnaires ; la SOCILADRA vivote dans un "deux pièces" au sous sol de la Pharmacie du Marché au marché central ; la SOCIDRAP est éclatée en trois (SOCIDRAP consensuelle de Tjomb Clément, SOCIDRAP légale de Muma John et Gervais Mbarga et SOCIDRAP Fondamentaliste de Ngbwa Ayolo Bernard dit Billy Show), avec autant de Directions Générales ; la CMC Manu Dibango, créée le 3 septembre 2003, par la fusion de la SOCIM de Sam Mbendé et Grâce Decca et la SOCADROM de Ekambi Brillant est dans la tourmente, pendant que la SOCADAP de Ondigui Onana Théodore cherche désespérément les moyens de se loger. Les sociétés, de manière générale, sont en proie à des déchirements internes ; les dirigeants sont contestés par leur base ; les Conseils d'Administration ne sont ni homogènes ni solidaires, du fait du mode de scrutin utilisé ; les perceptions sont arrêtées faute de bases juridiques. C'est le règne du "chacun pour soi", comme le montre l'exemple des cent (100) millions perçus par la CMC en décembre 2004, auprès de la CRTV, et non reversés aux autres sociétés. La paix sociale est gravement troublée. La seule évocation de ce contexte suffit à révéler l'acuité et l'urgence des problèmes à résoudre, ainsi que l'ampleur du travail dévolu à la CPMC. Après un diagnostic froid et insensible, le Ministre d'Etat Léopold Ferdinand Oyono, alors chargé de la Culture, prescrivit à cette structure des directives précises : rétablir et maintenir la paix dans le milieu artistique ; mettre en activité les lois et décrets en vigueur ; mettre en fonctionnement les sociétés de gestion collective ; élargir et approfondir l'assiette de perception du droit d'auteur ; rétablir l'harmonie au sein des sociétés. La tâche était ardue ; et bien hardi eut été celui qui aurait parié sur la réussite de la CPMC. Certains, orphelins de repères juridiques, avançaient l'idée de son illégalité ; d'autres prédisaient son échec. Le défi, en tout cas, était important. Sous l'autorité du Ministre d'Etat Léopold Ferdinand Oyono, avec courage et détermination, malgré l'adversité et le manque de moyens, la CPMC se mit au travail, et les résultats sont aujourd'hui palpables : depuis leurs difficiles refondations datant de 2005 seulement, les sociétés de gestion collective du droit d'auteur existent et fonctionnent à peu près convenablement, bien qu'elles souffrent logiquement de maladies infantiles ; les barèmes de perception ont été fixés après de longues et intenses négociations avec quatre cents (400) catégories d'usagers du droit d'auteur ; afin d'accroître sensiblement les ressources des artistes, l'assiette de recouvrement du droit d'auteur a été, conformément à la loi, élargie et approfondie ; après d'âpres négociations de dix huit (18) mois, les quatre cent soixante quatorze (474) entreprises membres de la Division des Grandes Entreprises de la Direction Générale des impôts sont désormais appelées à s'acquitter de la redevance du droit d'auteur, dans le respect du principe cardinal de l'utilisation effective des œuvres ; un accord important est conclu avec les propriétaires de bars et débits de boissons qui devraient fournir à la CMC 80% de ses revenus ; des barèmes de répartition intersociale sont établis ; des mesures de sécurisation des recettes sont prises et notamment la création du Compte de Dépôt Spécial (qui reçoit toutes les sommes perçues au titre du droit d'auteur. Il ne peut être mouvementé qu'avec les signatures des PCA et celle du Président de la CPMC) et l'application de la règle des trente - soixante dix (30-70) qui réserve les soixante dix pourcent (70%) des sommes perçues aux répartitions des droits aux artistes ; les répartitions sont régulièrement faites. Il y en a eu, toutes sociétés et toutes catégories d'art confondues, dix neuf (19) au total depuis 2005, soit cinq fois plus que la SOCINADA en dix ans d'existence ; des aides à la production ont été octroyées par la CPMC à deux cents (200) artistes, toutes corporations confondues ; ceux qui ont malheureusement perdu la vie ont été inhumés dignement (Njang le Zappeur, Massa Batre, etc.) ; les artistes malades sont au moins partiellement pris en charge ; la formation des percepteurs a été faite ; la CPMC a gagné tous les procès intentés contre elle en justice. Il fallait le faire ! Entêté jusqu'au délire, qui oserait penser, dire ou écrire que cette œuvre réalisée en moins de quatre ans d'existence de la CPMC n'est pas remarquable. Elle n'est pas pour autant parfaite. Mais, n'y relever que des points appendiculaires de discorde, ne confine pas moins au pernicieux et à une critique pyromane. En effet, quelques bons esprits, sans doute omniscients et infaillibles, ont attendu que d'autres s'échinent à concevoir et implémenter le système actuel, pour tenter de le discréditer, au moyen d'arguments faussement ravageurs. Cela, en négligeant d'observer que l'infrastructure en vigueur représente un fort investissement intellectuel et physique ! Ils reprochent ainsi à l'ancienne équipe de la CPMC, par un juridisme d'un autre temps, d'avoir pris des distances par rapport aux textes, qui l'enfermaient dans le tabernacle de la médiation et du contrôle. Selon eux, l'aide à la production (Hélas confondue avec le métier de producteur !), de même que l'action sociale de prise en charge des artistes décédés, malades ou en détresse, ne s'inscriraient pas dans le mandat statutaire de la CPMC. Poussant à l'extrême l'inconséquence, ils déplorent que le taux de redevance réparti a été en deçà des standards universels, conçus dans l'antre de leur imagination débordante. Ces critiques manquent d'épaisseur et rusent avec la vérité ou la mesure. La critique est en effet aisée, et l'art difficile. Il importe avant tout, de se demander si, dans le contexte de 2004, la CPMC, sollicitée comme sapeur pompier, et devant agir sous la pression de l'urgence d'une grave crise du droit d'auteur, pouvait atteindre ou même seulement viser la perfection, sans tomber dans les travers du pointillisme et s'enliser dans les lenteurs du méticuleux. L'exécution ponctuelle de ses missions lui commandait d'allier la spontanéité de l'action à la recherche de la qualité des prestations. Il va de soi que cette considération eût fourni à ses pourfendeurs, au moins une circonstance atténuante, s'ils n'étaient aveuglés par une injustifiable envie de nuire ou de paraître. Pour les témoins avisés de l'évolution du droit d'auteur, c'est déjà un miracle que d'avoir pu remettre en marche le train des répartitions des droits aux artistes ; c'est également un miracle, que les organismes camerounais de gestion collective du droit d'auteur, aient pu effectuer des payements de droits, à un taux largement supérieur à la moyenne, dès la première année de leurs refondations. Faut-il à cet égard, souligner que selon les instances internationales, elles n'étaient guère astreintes à l'observation de cette obligation ? Car elles pouvaient choisir de n'effectuer ces premières répartitions qu'au bout de leur troisième année d'existence. Est-il besoin de rappeler que nombre de leurs consoeurs européennes ne commencèrent à répartir les droits aux artistes qu'après neuf (9), dix (10), voire cinquante (50) années de fonctionnement et de perceptions effectives ? Sait-on que la proportion des sommes mises en répartition dépend, sans doute du volume des perceptions, diminué des charges de recouvrement et de fonctionnement ; mais aussi et surtout, de l'importance des produits des placements financiers et des activités connexes, que nos sociétés ne peuvent encore générées, du fait de leur jeunesse et d'un contexte peu propice ? Ce contexte, qui justifia par exemple que les frais de perception fussent estimés, dans la réalité, à trente pour cent (30%) à l'époque de la SOCINADA, et ramenés à quatre pour cent (4%) seulement depuis 2004. L'ignorant, certains reprochent à l'ancienne équipe de la CPMC, de les avoir ainsi diminués, laissant ainsi croire qu'ils pourraient être supprimés. D'autres condamnent cette même équipe, décidément devenue bouc émissaire, comme coupable d'avoir humanisé son action, en redonnant, sous diverses formes, aux artistes leur argent. Procès de l'humanisme, et donc crime d'humanisme ! Que n'aura-t-on entendu, qui ne s'adosse sur une conception métaphysique de la fonction de médiation ? Or, théorique et désincarnée, celle -ci se rognerait les ailes au contact d'un quotidien constitué de négociations souterraines ou informelles, d'échanges de services, d'apaisements, de compensations financières ou matérielles, dans un objectif de conclusion d'un accord ou de maintien de la paix, voire de rétablissement de l'harmonie. Apparaît alors, invisible pour certains, le lien indispensable qui unit la médiation à l'aide à la production ou à l'action sociale. C'est dire que dans son fonctionnement concret, la médiation ne s'accommode guère d'une posture bureaucratique, économe d'efforts physiques et de chaleur humaine. Elle exige au contraire, disponibilité permanente, spontanéité de la réaction, humilité de l'approche et sacrifices financiers. Mais surtout, elle méprise le dirigisme et souhaite la réalisation de l'adhésion qui, seule, lui confère sa légitimité. Inédite dans le paysage du droit d'auteur camerounais, la première CPMC devait, pour cela, s'y enraciner, en construisant sa légitimité organique et fonctionnelle. Son œuvre porte inévitablement la marque de cette préoccupation fondamentale. Perfectible, elle ne saurait non plus prétendre réaliser l'unanimité autour d'elle. Mais l'unanimité est-elle de ce monde ? L'essentiel est qu'aujourd'hui, cet héritage légué par Léopold Ferdinand Oyono, a reçu le satisfecit des organisations internationales, de nombreuses sociétés étrangères de droit d'auteur et du Chef de l'Etat en personne. Il n'est pas jusqu'au Premier Ministre (M. Peter Mafany Musonge) qui, à l'occasion d'un discours au Parlement, n'ait salué cette énorme contribution, en observant que la sérénité était revenue dans le milieu du droit d'auteur. Mais en plus, cet héritage rencontre l'adhésion et la reconnaissance de l'écrasante majorité des artistes qui, silencieux, observent d'un œil goguenard une poignée d'entre eux s'époumoner dans les médias, et servant des intérêts inavoués. Au regard de ce qui précède, peut-on valablement dire qu'un jour nouveau ne se soit levé pour le droit d'auteur au Cameroun que depuis le 07 septembre 2007 ? Assurément non ! Sauf à falsifier les faits et à masquer la vérité. 2- La vérité est par exemple visible sur le plan de la gouvernance financière. Il existe au Ministère de la Culture un rapport sur les états financiers de la CPMC, commandé par l'ex Ministère de la Culture, réalisé par un cabinet international et indépendant, qui n'a pas relevé d'entorse aux règles financières établies dans le cadre de la gestion collective du droit d'auteur. L'exploitation de ce rapport aurait révélé la vérité des chiffres. En effet, contrairement à une opinion largement répandue par des professionnels de la manipulation, le droit d'auteur ne représente au Cameroun qu'environ quatre cent cinquante millions (450.000.000 FCFA) en moyenne par an depuis 2004. Pour environ vingt mille (20.000) auteurs et quinze mille (15.000) artistes ; et quatre (4) sociétés ! Et la barre du milliard annuel, qui attise tant de convoitises et de quêtes de positionnement, ne pourrait être approchée, atteinte ou franchie qu'après l'application des textes OYONO, en particulier les décisions du 13 janvier et du 12 mai 2006. L'on peut, d'ici, imaginer la surprise, voire la déception de certains. On est en effet loin, et même très loin, des milliards souvent ânonnés par les médias. Au total, à ce jour, aucun élément matériel n'a été recueilli qui puisse justifier certaines allégations. Et lors même qu'il existerait, il eut fallut attendre la décision finale d'un juge, pour se répandre en commentaires aussi péremptoires. D'autant qu'un procès du droit d'auteur, confiné à la période 2004- 2008, ne réussirait qu'à révéler une opération à tête chercheuse ; car la CPMC a dû gérer une situation qui plonge sa source à la SOCADRA et a irrigué la SOCINADA. Par ailleurs, à propos de l'Assemblée Générale de la SOCILADRA qui est souvent évoquée, les articles de presse feignent d'ignorer que la justice a, jusqu'à présent, toujours débouté le Professeur Hubert Mono Ndzana de toutes ses multiples requêtes contentieuses, légitimant ainsi l'Assemblée Générale du 27 janvier 2007, l'élection de Madame Elise Mballa et l'œuvre de la CPMC. Encore, cette légitimité était-elle déjà consacrée par le sentiment populaire, tant le saut qualitatif opéré par la SOCILADRA, depuis l'arrivée de la nouvelle équipe, est grand. Qu'il suffise, pour s'en convaincre, de rappeler que la SOCILADRA de l'ère MONO NDJANA était endettée à hauteur de quatre cents millions de FCFA (400. 000 000 FCFA) ; qu'au regard des statuts, elle devait être dissoute ; que les employés de cette société cumulaient, sous le Professeur MONO NDJANA, vingt (20) mois d'arriérés de salaires ; qu'au mieux, ces employés recevaient entre mille (1000) et dix mille (10.000) FCFA par mois ; que pendant ce temps, le Professeur MONO NDJANA ne se privait pas, quand il le pouvait, de son indemnité mensuelle de un million (1000. 000) de FCFA ! Faut-il ajouter que dix - huit (18) administrateurs sur dix-neuf (19) avaient, pour les raisons ci-dessus évoquées, signé l'acte de convocation de l'Assemblée Générale du 27 janvier 2007 ? C'est tout dire ! 3- Si l'on peut comprendre ou soutenir le désir ardent et dévorant de s'affirmer qui anime la nouvelle Ministre de la culture, l'on s'interroge cependant sur la volonté de la présenter comme une sorte de "Zorro" des temps modernes. Nul n'ignore en effet que la construction d'un édifice postule la démarche de Sisyphe : un pas ; encore un pas ; et tenir pour gagné chaque pas. Il s'agit d'une construction pièce par pièce, à laquelle chacun apporte sa contribution, en veillant au respect et à la préservation des acquis. Démarche de sagesse s'il en est, qui s'accommode mal d'une posture à la Pénélope. Lorsque, au surplus, celle-ci se réchauffe au foyer d'une griserie de pouvoir, elle aboutit à une rageuse envie de faire table rase du passé. Pourtant, Boutros Boutros Ghali exhortait justement toutes les personnalités fraîchement désignées, à observer le plus grand respect à l'égard de leurs prédécesseurs et de leurs œuvres au risque, sinon de s'exposer à un cinglant désaveu du futur. En effet, le Comité d'Evaluation créée au Ministère de la Culture a, poliment mais fermement, confirmé la légalité et l'opportunité de la CPMC ; ce qui a justifié la nomination de nouveaux membres, sur la base des textes anciens, c'est-à-dire ceux légués par Léopold Ferdinand Oyono. Il a préconisé le maintien de la CPMC, moyennant l'affichage de sa fonction de régulation, le renforcement de ses pouvoirs et son organisation par un décret primo ministériel ou présidentiel. Et que, seul le souci discutable de ne pas dépouiller le Ministère en charge de la Culture de toute autorité directe sur le droit d'auteur, justifie la solution de proposer, comme socle juridique de la CPMC, un arrêté ministériel. De même, dissimulation de l'information ou manœuvre consciente d'intoxication, l'on refuse généralement de signaler que, selon le Comité d'Evaluation, les textes élaborés sous Ferdinand Léopold OYONO ne sont, ni illégaux ni inconstitutionnels. Quant à leur caducité, point n'est besoin de l'évoquer, tant le maniement de ce concept est délicat, même pour les juristes les plus avisés, et a fortiori pour les non juristes. Au point que le travail de ce Comité, pourtant créé et organisé à grand renfort de publicité, ne se réduit plus qu'à la transformation, en un projet de texte général relatif aux modalités de perception du droit d'auteur, de la décision du 13 janvier 2006 (décision d'approbation de l'accord avec le Gicam), élaborée sous l'autorité directe de Son Excellence Ferdinand Léopold Oyono et signée par Son Excellence Ferdinand Léopold Oyono. Que dire alors de l'intention de créer une Commission d'Arbitrage, sinon qu'elle résulte d'une lecture hâtive de l'article 62 alinéa 2 de la loi du 19 décembre 2000. Quant aux procès invoqués (parfois confondus avec les recours administratifs !) comme justification de la frénésie ambiante, qu'il suffise de signaler que, non seulement ils n'ont pas l'ampleur quantitative déclarée, mais aussi, à ce jour, aucune juridiction n'a annulé un texte relatif au droit d'auteur. Encore sait-on que le procès est un indice de vitalité d'un secteur d'activité. Il n'y a donc pas de quoi s'en émouvoir, au point de tenter vainement, comme par maternalisme à l'égard des sociétés de droit d'auteur, de les empêcher, puisqu'ils existeront toujours. En Europe par exemple et dans nombre d'autres pays, le droit d'auteur donne lieu à des centaines voire à des milliers de procès par an, sans que l'architecture en vigueur ne soit ébranlée, ni remise en cause. Car, l'on sait, là-bas, que le procès est une manifestation de la liberté de penser. Aussi, intenter un procès ne signifie t-il pas forcément qu'on le gagnera ; en particulier lorsqu'il s'agit de conventions librement négociées entre des personnes privées (sociétés de droit d'auteur et usagers) et simplement approuvées par le Ministère. Cette considération conduit à deux questions fondamentales : Le Ministère de la Culture peut-il unilatéralement revisiter et réviser des conventions conclues entre personnes privées ? Sauf connivence particulière, peut-il, sous couleur d'évaluation, se substituer à la CPMC pour convoquer les usagers et sociétés de droit d'auteur, afin de les obliger à modifier leurs accords ? Tout ceci s'illustre par sa grande puissance d'égarement. Pendant ce temps, les divisions renaissent et s'accentuent au sein de la communauté des artistes ; les usagers du droit d'auteur, d'habitude rétifs à s'acquitter de leur redevance, trouvent dans l'agitation actuelle un motif supplémentaire de refus de payer ; les sociétés de gestion collective du droit d'auteur se meurent, du fait du faible niveau de recouvrement de la redevance du droit d'auteur; les conditions de vie des artistes se dégradent ; les répartitions deviennent hypothétiques ; pour des raisons évidentes, l'événementiel prend le pas sur le développement durable du droit d'auteur; les responsables des sociétés de gestion collective, au mépris de la loi, sont appelés à retarder la tenue de leurs Assemblées Générales ; le secteur du droit d'auteur est impacté par les intrigues et les mensonges d'une infime minorité, revancharde ou assoiffée de pouvoir qui, hier muselée par la volonté populaire, retrouve subitement, à la faveur d'un contexte ministériel fertile, voix au chapitre. Tout s'explique aisément : l'on a préféré Pénélope à Sisyphe, au risque de subir le sort de Gribouille. (*) Pr Magloire Ondoa, Agrégé des Facultés de Droit, ex Président de la Commission Permanente de Médiation et de Contrôle des organismes de gestion collective du droit d'auteur et des droits voisins (CPMC)




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