GRANDS PROJETS: Louis Paul Motazé peut-il réussir ?

Par | Repères
- 01-Apr-2010 - 08h30   58968                      
27
Autoroute Yaoundé-Douala: 500 milliards à mobiliser par Eximbank; Déjà 260 milliards pour soutenir l'investissement de Camwater; 2ème pont sur le Wouri: 10 milliards pour finaliser les études
Le ministre de l'Economie a le sensible devoir de trouver les ressources financières pour financer les projets infrastructurels annoncés par le président de la République, le 31 décembre 2009. Des projets tous vitaux, pour lesquels chaque minute compte. Il y a deux ou trois ans, la plupart n'en étalent qu'à un stade de balbutiements, voguant de «séminaire en atelier». Aujourd'hui, ils matérialisent l'espoir de toute une économie, de tout un pays. Au moment où s'achève le premier trimestre de l'année 2010, la question fatidique commence à grandir: M. Louis Paul Motazé peut-il réussir ? Ou l'inverse: Peut-il faire mentir le Président ? Les lecteurs du présent dossier sont invités à une incursion dans les tractations permanentes pour le bouclage financier du port en eau profonde de Kribi, du barrage hydroélectrique de Memve'ele, du ?? de retenue d'eau de Lom Pangar, de l'autoroute Yaoundé-Douala... et du programme d'investissement de la Camwater.

Autoroute Yaoundé-Douala: 500 milliards à mobiliser par Eximbank

Elaborées en collaboration avec les responsables chinois, les études de faisabilité du projet de construction de l'autoroute Yaoundé-Douala ont déjà été présentées et validées. Des négociations sont en cours avec Eximbank China pour la signature d'un protocole d'accord définitif pour le financement du projet, évalué à 500 milliards de francs CFA. Mercredi 24 mars, le président d'Exim Bank était personnellement présent à une rencontre de concertation organisée avec le gouvernement au sujet des projets à financer par la banque chinoise. Parmi les deux projets prioritaires présentés par le ministre de l'Economie, soutenu par le ministre des Travaux publics, M. Bernard Messengue Avom, figurait l'autoroute Yaoundé-Douala. Un dossier a déjà été acheminé à la partie chinoise, mais deux contraintes doivent être levées, que M. Louis Paul Motazé a présentées comme des formalités. Il s'agit d'indiquer à la banque chinoise si le gouvernement souhaite un crédit dans son guichet commercial, ce qui suppose un certain taux d'intérêt à supporter. « Même dans le cas d'un crédit commercial, les taux d'intérêt d'Eximbank restent les plus compétitifs comparés aux créanciers ordinaires », indique le Minepat. Mais il y a mieux: c'est le crédit préférentiel, un crédit à taux d'intérêt nul, que Eximbank accorde dans le cadre de l'aide après avis du gouvernement chinois. «Mais, il y a un bémol, c'est que ce guichet dispose d'une enveloppe bien déterminée pour chaque pays, dès que le quota annuel est atteint, il faut se tourner ailleurs», commente M. Louis Paul Motazé. Il y a aussi possibilité de mélange des deux types de crédit. Pour ce qui concerne le projet d'autoroute Yaoundé-Douala, de même que le barrage de Memve'ele, le gouvernement précisera le type de financement sollicité d'ici à juin prochain. «Les discussions avec les responsables de Exim Bank ont permis de savoir quel est le quota du crédit préférentiel, afin de savoir comment nous positionner par rapport à l'ensemble des projets que nous voulons financer», a confié le Minepat. Deuxième contrainte à lever: les garanties de remboursement. «La crédibilité économique croissante de notre pays nous permet d'être sereins de ce côté-là», déclare un responsable du Minepat. De plus, les calculs effectués indiquent assez clairement que les seules recettes du péage seront susceptibles de faciliter le remboursement de la dette contractée. Dans l'hypothèse, fort probable, d'un accord de financement au début du second semestre 2010, le gouvernement va signer une convention avec la CCCC, l'entreprise chinoise pressentie pour l'exécution des travaux. Permettant ainsi la concrétisation d'un vieux rêve des automobilistes camerounais: une autoroute qui relie deux villes importantes. Partait N. Siki

Eau potable: Déjà 260 milliards pour soutenir l'investissement de Camwater

Maquette de l'usine d'eau sur le moungo est comme un cadeau qui arrive après l'heure, mais un cadeau quand même. Le 21 janvier 2010, la Camwater, bien que la Noël soit loin, a coulé sous des confettis de milliards. C'était à Yaoundé au cours d'une cérémonie de signature de deux accords de financement entre le Cameroun, que représentait le ministre de l'Economie, M. Louis Paul Motazé, et deux bailleurs de fonds occidentaux. Le premier accord représente un prêt de 26 milliards de F CFA accordé au Cameroun par la Banque européenne d'investissement (Bei). Le second représente tout aussi une convention de prêt paraphée par le Minepat et M. Gille Chausse, le directeur de l'Agence française de développement (Afd) au Cameroun. Cet organisme met à la disposition du Cameroun la somme de 40 milliards de F CFA. C’est donc en tout 66 milliards qui arrivent dans les caisses de la Camwater. Ce qui porte à plus de 260 milliards l'enveloppe des fonds récoltés par le Minepat et mis à la disposition de cette entreprise publique de patrimoine chargée de la production de l'eau potable au Cameroun, pour la mise en œuvre de son programme d'investissement fixé à 400 milliards de F CFA. Cet ambitieux programme, qui couvre une période de dix ans, prévoit l'érection des infrastructures modernes sur toute l'étendue du territoire. A terme, apprend-on d'une source interne à la Camwater et proche de ce dossier, l'entreprise camerounaise née sur les cendres de la défunte Snec ambitionne de construire une station de pompage en eau potable dans chaque département du territoire national. Mais en attendant, il faut parer au plus pressé: augmenter l'offre en eau dans les grands centres urbains où la pénurie bat son plein. La Camwater, en cette année 2010, annonce donc le début des travaux de réhabilitation de l'usine de traitement en eau sur le fleuve Mefou. Cette installation, qui avait été abandonnée il y a quelques années pour une panne de l'ordre de 500 millions, est là pour améliorer la desserte en eau dans la ville de Yaoundé. Le directeur général de la Camwater, M. Basile Atangana Kouna, a fait savoir que les fonds relatifs à ce projet sont déjà disponibles. A la fin de ces travaux, l'offre en eau de Yaoundé passera de 100 000 mètre cube actuellement à 150 000 mètres cube. Et à la Camwater, si on en croit les différentes interventions sur les médias, n'a pas l'intention de laisser pourrir la situation. Ils en veulent pour preuve la fin des travaux de l'usine de traitement d'eau à Ayatto, adossée sur le fleuve Moungo, destiné à l'alimentation en eau potable de la ville de Douala. Une réalisation qui s'accompagne de la construction de six forages urbains. L'offre de cette ville passera donc de 105 000 mètres cube à 150 000 mètres cube. Pour compléter les fonds nécessaire au financement intégral de son programme d'investissement, Camwater aura encore besoin de l'entregent de M. Louis Paul Motazé. Des négociations sont en cours avec la Banque islamique de développement, la Badea, l'Opep fund for investment and development (Ofid) et Eximl Bank Corée. Michel Ange Nga

Lom Pangar: Démarrage des travaux en novembre 2010

Les travaux de construction de la cité du maître d'ouvrage du barrage hydroélectrique de Lom Pangar sont imminents. Les investisseurs ont tous confirmé leur participation au projet. Ce n'est plus une question d'argent. Pilote du financement du projet Lom Pangar, le ministre de l'Économie, de la planification du développement et de l'aménagement du territoire, M. Louis Paul Motazé, a depuis novembre 2008 bouclé les financements: environ 160 milliards de F CFA. L'Agence française de développement (Afd) a mis sur près de 40 milliards de francs Cfa. Le groupe que- mondiale: 34 milliards de francs Cfa. La Banque européenne d'investissement, 20 milliards de francs Cfa. Le Fonds saoudien, 12 milliards de francs Cfa. La Banque africaine de développement (Bad), 43 milliards de francs Cfa, le groupe Value Analytics d'Afrique du Sud apporte près de 7 milliards de francs Cfa, la Banque de développement des États de l'Afrique centrale contribue pour 10 milliards de francs Cfa, etc. Afriland First Bank et la Standard chartered Bank au Cameroun sont disponibles pour offrir des crédits relais pour un montant de 50 milliards pour ce projet à la rentabilité incontestable. D'après EDC, le budget afférent au processus d'indemnisation des populations qui démarre en juin «est déjà disponible». En attendant que toutes ces ressources financières soient effectivement débloquées, même si toutes les assurances ont été données par les différents investisseurs, le ministère de l'Economie a prévu 32,2 milliards dans le budget 2010 pour le démarrage des travaux. En effet, les procédures des bailleurs de fonds sont telles que les premiers financements ne pourraient intervenir qu'en début 2011. Trop tard pour le gouvernement et pour le chronogramme du projet qui prévoit une mise en eau partielle en juillet 2012. Le vrai point de retard est l'affinement et la mise à jour du plan environnemental, de l'étude d'impact environnemental réalisée en 2005 et du plan de gestion de l'environnement. En collaboration avec la Banque mondiale, la Banque européenne d'investissement (Bei) et l'Agence française de développement (Afd), parmi les investisseurs du projet, Edc a lancé, mercredi 3 février 2010, la mise en commun des études d'impact environnementales et sociales disponibles. Elle doit, selon Edc, aboutir à une Evaluation environnementale et sociale (Ees) cohérente et crédible assortie d'un plan de gestion environnementale (Pges) objectif et fiable. Une exigence préalable soutenue principalement par la Banque mondiale, au risque d'irriter la partie camerounaise impatiente de réaliser ce projet vital pour l'économie camerounaise. Les travaux de construction du barrage hydroélectrique de Lom Pangar doivent durer 42 mois. C'est un barrage d'une capacité utile de 6 milliards de m3 d'eau pour régulariser le débit des ouvrages en aval de la Sanaga. Par sa seule réalisation, Lom-Pangar apportera un complément d'énergie de 250 Gwh au barrage de Song Loulou et Edéa. Mais pour que cet objectif de production soit atteint, il est nécessaire que la centrale de Song loulou soit en bon état de marche à la mise en service de Lom Pangar et que la centrale d'Edéa soit rénovée. Sylvain Andzongo

Port en eau profonde de Kribi: Le phare du futur dragon

Au mois d'avril 2010, vont démarrer les opérations de relocalisation des populations à déguerpir sur les 30 km de côte qui vont servir à la construction des différents terminaux et des infrastructures de base du port en eau profonde de Kribi, de même que seront lancées les indemnisations des occupants. Une première enveloppe de 10 milliards de FCFA a été prévue dans le budget 2010 du ministère de l'Economie à cet effet. Les études préliminaires, qui ont consisté à recueillir un ensemble de données techniques sur la terre ferme, sur l'eau et dans l'eau, sont aussi achevées. D'une taille titanesque, le complexe portuaire s'étale sur 30 000 hectares. Le port général accueillera des grands navires de commerce, d'une capacité allant jusqu'à 100 000 tonnes et d'un tirant d'eau de 15 à 16 mètres. A 30 km de là, dans la localité de Lolabé, il est prévu un appontement minéralier par lequel devra transiter le trafic d'exportation du minerai de fer (35 millions de tonnes par an) et pouvant recevoir des navires minéraliers de 30 000 tonnes de 24 mètres de tirant d’eau. A Mboro, le port général à caractère industriel et commercial, comprendra notamment un terminal conteneur, un terminal aluminium, un terminal hydrocarbure et un terminal polyvalent. L’exploitation et la possibilité d’évacuation du gisement de diamant estimé à 750 millions de carats dans la Boumba et Ngoko, le cobalt dans la région de Lomié toujours à l'Est, l'uranium dans les régions de Poli dans le Nord et de Lolodorf dans la Province du Sud sont également à l'ordre du jour. La question est de savoir comment le Cameroun compte-t-il financer le projet estimé en lui-même à 280 milliards de FCFA et dont les 500 km de voies annexes nécessiteront environ 300 milliards de FCFA ? Alors que les liquidités se font rares sur les marchés internationaux et que les investisseurs restent encore très prudents, des opérateurs et bailleurs de fonds de divers horizons sont à pieds d’œuvre. A l’exemple de M. Xu Jifei, DGA du groupe China National Electric Equipment Corporation, qui a souscrit un engagement éventuel pour la construction des infrastructures de base, fort de son expérience dans ce domaine en Chine. La China National Electric Equipment Corporation pourrait y mettre jus- qu'a 200 millions d'euros (environ 131 milliards de FCFA). Pour chacun des terminaux (fer, hydrocarbures, aluminium, etc.) les entreprises partenaires de chacun de ces secteurs sont d'ores et déjà prêtes pur la construction de leurs appontements. En attendant que les financements attendus de divers créanciers arrivent, la contribution de l’Etat au démarrage de ce projet est de 34 milliard en 2010. M RE

Barrage de Memve’ele: La recherche de financement se poursuit

Le projet de construction du barrage de Memve'ele commence à prendre corps. Le consultant P??ry qui avait huit mois pour réaliser l'étude d'impact environnemental a déjà déposé sa copie et le rapport final sera présenté au ministre de l'Economie, de la planification et de l'aménagement du territoire (Minepat) au cours du mois d'avril 2010. Ce qui représente un gain de temps d'environ cinq mois sur les délais impartis au départ « Nous devons absolument analyser les travaux en cette année 2010. CMITIP l'a prescrit la haute hiérarchie, raison pour laquelle nous avons dû revoir les ? à trois mois pour l'étude d'impact environnemental au lieu de huit mois comme initialement prévue», explique un responsable impliqué dans le projet. Mais, ce rapport peut être validé ou rejeté. En cas d'approbation, il sera délivré aux responsables du projet un certificat de conformité environnementale, argument important dans le bouclage du financement, bien qu'il ne puisse constituer un frein pour l'accès aux fonds. Actuellement, les travaux tardent à démarrer véritablement car le montant global de ??? de FCFA indispensable pour la réalisation des travaux n'est pas encore rassemblé. Toutefois. Motazé a reçu une délégation chinoise composée des représentants d'EximBank Chine et de SinoHydro Corporation Limited, dans le cadre des négociations devant aboutir à l'octroi d'un prêt au Cameroun en vue de la réalisation du Projet d'aménagement Hydroélectrique de Memve'ele. Les négations se poursuivent d'ailleurs pour le bouclage du financement et le pourcentage de remboursement entre autres, car la partie chinoise attend du Cameroun qu'il lui présente les garanties de remboursement. Il faut noter que pour un montant total de 420 milliards de FCFA, EXIMBANK Chine doit contribuer à hauteur de 365 milliards de FCFA et le gouvernement camerounais 55 milliards, ce qui représente environ 15 % du coût global. Au cours d'une visite du président de Exim Bank au Cameroun, la banque chinoise a confirmé avoir examiné la demande de financement du gouvernement pour Memve’ele. Il reste à savoir si c'est un crédit commercial (qui suppose un taux d'intérêt), un crédit préférentiel (à taux d'intérêt nul) ou un crédit mixte qui est sollicité. La réponse sera connue en juin prochain. Pour appuyer ce projet en 2010, le Minepat a prévu 900 millions. L'entreprise SINOHYDRO Corporation Limited chargee de conduire les travaux, doit construire la route pour permettre de faciliter le déplacement sur le site, réaliser le le barrage de Memve’ele, construire des ligne et ouvrages d’évacuation d’énergie produite et mettre sur pied un poste de transformation dans les régions du Sud. La centrale hydroélectrique aura une puissance installée de 201 MW. Bibiane Djayau

2ème pont sur le Wouri: 10 milliards pour finaliser les études

Déjà cinq ans qu'on en parle. L'idée de la construction d'un deuxième pont sur le fleuve Wouri à Douala remonte à 2005, année au cours de laquelle le gouvernement s'est engagé dans la réfection de l'actuel pont, vieux de 56 ans. Au cours d'un séminaire de présentation du document de stratégie pour la croissance et l'emploi (Dsce) à Douala le 10 mars 2010, le secrétaire général du ministère de l'Economie, de la planification et de l'aménagement du territoire (Minepat) a laissé entendre que les travaux pourraient être achevés dans cinq ans. Pour l'heure, le Minepat est encore à la phase des études. Pour l'année 2010 le Minepat a prévu une enveloppe de 10,6 milliards de F CFA, pour la « finalisation des études et l'avance de démarrages travaux ». Une décision de prudence, compte tenu de la longueur de certaines procédures des investisseurs du projet. La construction de ce pont reste très attendue par les populations et les opérateurs économiques de Douala en particulier et du pays tout entier, notamment des régions de l’Ouest, du Sud-ouest et du Nord-ouest. Le ministre des travaux publics (Mintp), à qui va échoir la construction de cet ouvrage, l’évalue à 120 milliards de FCFA, les accès compris. Le dossier d'avant-projet sommaire et le rapport d'étude géotechnique provisoire sont déjà disponibles au Mintp. Les entreprises ayant soumissionné à l'avis à manifestation d'intérêt pour la présélection des entreprises et des groupements d'entreprises admis à l'appel d'offres lancé le 10 février 2010, auraient dû déposer leurs dossiers de candidatures le 19 mars 2010. Mais cette date a été repoussée au 6 avril 2010. Sur le mode de financement adopté, le consultant Egis Route qui a effectué l'étude de viabilité financière du projet a proposé trois options au gouvernement en 2008: un contrat de partenariat, une concession et une construction en maîtrise d'ouvrage publique, avec maintenance-en régie. Concrètement, le deuxième pont sur le Wouri sera construit en parallèle à l'actuel, allant de Bonabéri à Deido, sur une distance de 1200 m, dont environ 820 m pour la longueur du pont. Il sera construit sur un format de deux voies de 7 m fois deux et séparées par une voie ferroviaire bidirectionnelle de 4m de large. Ses concepteurs pensent qu’il permettra la traversée de 40 000 véhicules par jour, soit 10 000 en plus que ce qui se fait sur l’actuel pont sur le Wouri.




Dans la même Rubrique