Jean-Pierre Bekolo - Lettre à Paul Biya: Nous Camerounais si nuls et que vous président si bon…

Par Jean-Pierre Bekolo | Le Jour
- 27-Apr-2012 - 08h30   53617                      
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Monsieur le président, aujourd’hui nous constatons que «vous nous avez perdu le temps» et nous savons que vous ne pouvez pas nous rendre notre jeunesse.
Monsieur le président, si vous et nous sommes encore ensemble aujourd’hui, c’est parce que nous sommes mariés. Bien qu’il s’agisse d’un mariage arrangé, j’ai le sentiment que notre mariage fut en fait un mariage forcé car, il est apparent aux yeux du monde que nous ne nous aimons plus. Si nous sommes encore ensemble aujourd’hui, c’est parce que notre mariage a évolué pour finalement devenir un mariage de raison. Il semblerait que nous ne vous méritons pas, Monsieur le président. Nous, Camerounais, sommes tellement nuls et vous, président, êtes tellement brillant… Nous, Camerounais, sommes tous des voleurs et vous, président, vous restez le seul homme honnête de ce pays. Nous, Camerounais, sommes tellement décevants et vous, président, vous êtes la seule, personne efficace qu’il nous reste. Nous, Camerounais, sommes tellement fainéants et vous président, vous êtes le seul à vraiment travailler… Oubliant que si nous sommes ce que nous sommes, c’est aussi à cause de vous qui avez la charge de l’organisation de nos vies. En d’autres termes, le temps est venu pour que vous assumiez le mauvais comportement de vos «enfants». Les Camerounais ne peuvent pas tous être si mauvais sans que vous ayez une part de responsabilité. Tout ça ne peut être que de la faute des autres! Si vous étiez vraiment bon, nous ne serions pas aussi mauvais! Monsieur le président, aujourd’hui nous constatons que «vous nous avez perdu le temps» et nous savons que vous ne pouvez pas nous rendre notre jeunesse. Vous êtes comme un polygame qui doit tout à sa première femme que nous sommes mais qui préfère la dernière. Comme si ça ne suffisait pas, vous continuez à faire de nous ce que vous voulez. La question que je vous pose, Monsieur le Président, est la suivante: pourquoi restez-vous encore dans ce mariage? Vous ne voulez plus de nous, Monsieur le président, vous ne nous aimez plus, si vous nous avez seulement jamais aimé ! Notre désamour est aujourd’hui consommé. Pourquoi continuer à rester dans cette union désormais vidée de son contenu : contraintes, arrangements, raison. Maintenant que nous savons qu’il n’y a plus rien entre nous, Monsieur le président, nous demandons une seule chose, rendez-nous notre liberté! Jean-Pierre Bekolo, Cinéaste




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