Justice – Entre le marteau et l’enclume: Le tribunal criminel spécial épingle Paul Kammogne Fokam

Par Mathieu Nathanaël Njog | Aurore Plus
Douala - 19-Jan-2013 - 08h30   54612                      
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Pour faire obtenir la libération de sept de ses hauts cadres et étouffer l’affaire de détournement de fonds qui oppose sa banque à l’Etat du Cameroun, le Pdg d’Afriland First Bank a libéré un chèque de remboursement de 1,7 milliards Fcfa, représentant la somme incriminée.
I- Afriland Bank reconnue coupable de coaction de détournement Depuis le mois de juin 2012, le Tribunal de grande instance, Centre administratif du Mfoundi a enrôlé l’affaire opposant l’Etat du Cameroun, représenté par le ministère des Forêts et de la Faune à Tagne Kamga Pdg de Camdev et Afriland First Bank, pour le délit de détournement de la somme de 1,7 milliards Fcfa, issue des fonds Ppte 2010, dudit ministère. Cela a entraîné l’interpellation puis la mise sous mandat de dépôt provisoire du Pdg de Camdev, Tagne Kamga. Seulement, le juge d’instruction chargé du dossier, dans son ordonnance de renvoi, décide d’inculper uniquement Tagne Kamga, en épargnant Afriland First Bank de sa part de responsabilité dans cette affaire, en dépit du fait que cette institution bancaire y est poursuivie en coaction. Au moment où le Tribunal de grande instance du Mfoundi décide d’enrôler l’affaire, c’est alors que le Tribunal criminel spécial (Tcs) entre en fonction. Et de fait, le Tgi du Mfoundi est dessaisi conformément à la loi portant création du tribunal criminel spécial. C’est alors que parcourant le dossier, les magistrats du Tcs se rendent compte qu’il y a anguille sous roche. Ils ne comprennent pas pourquoi, la responsabilité pénale d’Afriland First Bank n’est pas retenue dans cette affaire, pourtant, toute évidente. C’est alors qu’ils décident de reprendre totalement l’instruction. Et cela débouche sur l’interpellation de sept hauts cadres de la banque leader, en termes de dépôts, Afriland First Bank pour ne pas la nommer. Paul Fokam Kammogne, le Pdg et ses conseillers juridiques se sentant pris à l’étrier, tentent de la diversion, du dilatoire et des passe-droits pour obtenir les mêmes conclusions qui ressortent de l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction du Tgi du Mfoundi ; à savoir ne pas retenir la responsabilité pénale d’Afriland First Bank. Et empêcher en vain, la mis sous mandat de dépôt de sept de ses hauts cadres (voir liste ci-dessous). Ce d’autant plus que, cela permettrait d’ébruiter l’affaire et sérieusement plomber l’image de cette banque à capitaux nationaux dont les observateurs avertis des milieux de la finance ne cessent d’exalter les mérites et la bonne santé. Une affaire qui coïncide alors, avec les déboires que connait cette institution bancaire. Tout d’abord avec les récriminations de la Cobac qui l’accusait des dysfonctionnements structurels et opérationnels, notamment l’opacité de la gestion financière, mais aussi et surtout une discrimination dans l’octroi des crédits à l’investissement. Toutes choses qui auraient mis à mal le respect des ratios bancaires, et entraîné une forte dégradation de ses performances. Nous annoncions courant le mois d’Août un dossier spécial. Mais les autres affaires de prévarication de la fortune publique, au haut du pavé de l’actualité, avec notamment les audiences du procès Marafa Hamidou Yaya et autres ont eu raison de nous. Ce qui nous permet de laisser la justice suivre son cours normal. C’est ainsi qu’à l’issu de l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction du Tcs, l’affaire est renvoyée devant les magistrats du siège avec quasiment tous les huit protagonistes, le Pdg de Camdev et les sept hauts cadres d’Afriland First Bank, parmi lesquels, des directeur généraux des filiales internationales. Après que la collégialité des juges ait établi la culpabilité de tous les coaccusés, à savoir le Pdg de Camdev et d’Afriland First Bank, à la suite des débats, le Pdg d’Afriland Fist Bank, Paul Fokam Kammogne décide de passer à table. Avec le concours de ses conseils, il essaie d’étouffer l’affaire comme il peut. Aussi bien au niveau de la justice que de la presse. II- Fokam Kammogne rembourse à l’Etat, 1,7 milliards Fcfa détournées en douce C’est ainsi qu’en exploitant l’article 18 nouveau de la loi portant création du Tribunal criminel spécial, qui offre l’opportunité à l’inculpé de rembourser le corps du délit, et par ricochet entraîne l’arrêt des poursuites, en date du 16 janvier 2013, il a libellé un chèque de 1,7 milliards Fcfa en guise de remboursement de la somme détournée. Et depuis lors, il veut obtenir au forceps, la libération de ses sept hauts cadres. Seulement, il a feint d’ignorer que, certes, l’arrêt des poursuites relève de la compétence du Procureur de la République, mais ce dernier doit se référer au préalable au ministre de la Justice afin d’obtenir cette autorisation. Après que cet avis favorable sera acquis, par transmission de courrier, l’affaire devrait à nouveau être appelée en audience publique pour que l’arrêt des procédures soit prononcé. Comme ce fut le cas avec Yves Michel Fotso dans l’affaire de détournement de la redevance aéroportuaire due par la Camair à l’autorité aéronautique civil du Cameroun (Ccaa). C’est certainement, pour éviter tout cela que, le ministre des Finances, Alamine Ousmane Mey, au moment des faits, Directeur général d’Afriland Bank, a été mis à contribution pour voler au secours de son mentor. Selon des fuites parties des pénates du Ministre de la Justice et Garde des seaux, Laurent Esso, son homologue des Finances, Alamine Ousmane Mey l’aurait rencontré en mi-journée du mercredi 16 janvier 2013 pour accélérer la libération des hauts cadres d’Afriland Land. Poliment, Laurent Esso l’aurait fait savoir que la lettre ne lui était pas encore parvenue ; qu’il n’était pas inculpé dans cette affaire et que même si c’était le cas, il ne lui revenait pas de décider de l’interpellation d’un ministre en fonction. Par conséquent qu’il laisse que la procédure se poursuivre. Hier, jeudi 17 janvier 2013, les hauts cadres d’Afriland First Bank étaient assis au bureau du régisseur de la prison central de Yaoundé – Kondengui, sous le prétexte que leur ordonnance de main levée de détention serait signées en journée et qu’il ne s’agissait qu’une question d’heure. Seulement, ce que Paul Fokam Kammogne et ses conseils font fi d’ignorer, c’est que la réponse du ministre de la Justice peut être défavorable. Et dans le cas d’espèce, plusieurs éléments concourent à cette seconde hypothèse. Puisque pour la même affaire, l’ancien ministre, Elvis Ngolle Ngolle, dont-on soupçonne que c’est l’un des dossiers, qui l’auraient emporté, a porté plainte pour faux et usage de faux en écriture et utilisation frauduleuse du sceau de l’Etat. Puisqu’il est établi que pour débloquer frauduleusement les 1,7 milliards Fcfa d’un projet Ppte du Minfof, financé à hauteur de 3 milliards Fcfa, Tagne Kamga et ses comparses d’Afriland First Bank, auraient usé de faux et usage de faux. Ce qui donne lieu à un autre procès, cette fois là, qui est de la compétence du Tribunal de grande instance du Mfoundi. Et qui devrait s’ouvrir dans les tous prochains jours. Car, il s’agit tout d’abord, pour l’ex-ministre Elevis Ngolle Ngolle, de laver son honneur ; et pour la justice d’établir toutes les responsabilités, voire permettre de démanteler le potentiel laboratoire spécialisé qui a été utilisé pour imiter la signature du ministre, la fabrication des cachets avec le sceau de l’Etat et des papiers entêtes du ministère des Forêts et de la Faunes. Une affaire grave et très sensible, similaire à celle qui est pendante devant le tribunal de grande instance du Wouri et dans laquelle sont poursuivis Mme Kontckou, Paul Hiol, le maire de la commune rurale de Massock-Songloulou (en fuite) et ses sept autres coaccusés, parmi lesquels un cadre du ministère des Transports. Et par ailleurs, qui sont tous placés sous mandat de dépôt provisoire à la prison central de Douala, assorti de plusieurs rejets de demandes de mise en liberté provisoire. III- Les acteurs Tagne Kamga, Pdg Camdev Feyman devant l’éternel, il est arrivé au Cameroun avec un projet dénommé Camdev dans lequel il a extorqué les camerounais plusieurs millions Fcfa en les faisant miroiter des emplois pour certains des financements, l’auto-emploi pour d’autres. Tout cela s’est révélé du pipo, une entourloupette pour se mettre plein les poches et en douce. Après il a annoncé le projet de téléphonie fixe de grande masse, visant à rendre l’accessibilité aux postes fixes de téléphones à des prix défiant toute concurrence. Handou Louis Il est au moment de son incarcération, le Directeur Général d’Afriland Bank en République Démocratique du Congo. Et au moment des faits, Directeur général adjoint N°2 d’Afriland First Bank Cameroun, chargé des succursales dans les régions du Centre et de l’Ouest. Il avait été éloigné en prévision où l’affaire pourrait éclater afin de rendre impossible toute manifestation de la vérité. Seulement, lorsqu’il est convoqué pour être entendu devant le juge d’instruction du Tcs, même sa hiérarchie est confiante que tout se passerait comme devant le juge d’instruction du Tgi du Mfoundi. Mais, la suite est sans commentaire. Dadjeu Olivier Au moment de son incarcération, il est Directeur du Crédit d’Afriland First Bank en Guinée Equatoriale. Mais au moment des faits, il est directeur du Crédits et du Contrôle des engagements au siège d’Afriland First Bank Cameroun. Lui aussi est affecté à l’international pour rendre la manifestation de la vérité difficile et surtout faciliter la destruction des documents. Afin que les dirigeants de la banque en fonction déclinent au mieux toute leur responsabilité. Seulement, lorsqu’il est convoqué pour être entendu devant le juge d’instruction du Tcs, sa hiérarchie le met en confiance que tout se passerait comme devant le Tgi du Mfoundi. Mais mal lui en a pris. Dongmo Apollinaire Directeur des affaires juridiques et contentieux à Afriland First Bank, est l’un des maillons importants de ce montage frauduleux. Il est incarcéré dans cette affaire pour avoir apporté son expertise juridique dans le but de contourner la loi, afin que ni la justice ni les missions de contrôle de la Cobac, ne voient que dalle. Fokam Pauline Actuellement sous-directeur chargé des produits à Afriland First Bank; elle était au moment des faits, Directeur de la succursale de Yaoundé. Ce qui fait, de celle qui est petite-sœur d’André Siaka, un acteur de ce détournement puisque c’est au niveau de sa succursale que les transactions étaient faites. Kuate Pierre Il est Directeur des engagements centraux à la direction générale d’Afriland First Bank. Il est incarcéré dans cette affaire pour être l’un des maillons importants dans ce montant financier qui a permis de contourner la convention qui liait Minfof à la Camdev, afin de sortir frauduleusement l’argent d’un projet Ppte du Minfof pour des fins qui ne l’étaient pas. Fossi Jules Ancien, chef d’Agence d’Afriland First Bank du Collège de la Retraite, il a été interpellé depuis une retraite qu’il croyait douillet pour répondre des transactions financières qui ont été opérés depuis l’agence dont il avait la charge. Ce d’autant plus qu’il les a avalisées. Ngon Stéphanie Chef d’Agence adjoint d’Afriland First Bank du Collège de la Retraite, il est incarcéré dans cette procédure judiciaire, pour avoir, pendant qu’il assurait l’intérim validé plusieurs transactions financières qui ont permis de sortir frauduleusement l’argent d’un projet Ppte du Minfof pour d’autres fins.




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