Cameroun - Sceau de l'Etat: Le paiement des droits d'auteur attendu depuis 57 ans

Par MARTIAL OWONA | L'Anecdote
Yaoundé - 07-May-2013 - 17h53   52559                      
0
Michel Modo, l'auteur concepteur du dessin représentant une tête de la jeune fille entourée de «fleurs», figurant sur les cachets administratifs officiels de la République, se meurt dans l'indifférence totale de la patrie. Un peu comme les auteurs de l'hymne national du Cameroun. Une illustre «reconnaissance» dont seul sait faire montre notre nation.
Son nom passe pour inconnu de la mémoire collective. Comme le commun des Camerounais, on pourrait encore dire «ah, c’est un fou Eton de la Lékié», comme on les nomme. Pourtant c’est lui qui permet l’ensemble du triangle national, pour ce qui est des documents administratifs officiels, d’avoir toute leur légalité: Un cachet. Signe particulier de ce tampon, il porte en son centre une tête de jeune fille entourée de trois tiges de sésame dont deux devant le visage et la dernière derrière sa longue chevelure tissée. Dans la foulée du feu de la célébration du Cinquantenaire de la Réunification, l'ancien élève de l'Ecole Missionnaire St Charles d'Efok continue de revendiquer le paiement de ses droits de propriété intellectuelle. A corps et à cri puisque l'écho de ses complaintes, malgré sa démarche de conciliation à l'amiable avec les autorités de ce pays qu'il a tant chéri au point de lui faire don du fruit de son esprit, se perd en silence dans l'ingratitude et les lourdeurs administratives. Chacun des acteurs, à son niveau de pouvoir, se battant pour que jamais l’honneur revienne à ce «fou Eton». Contre toute attente pourtant, la paternité de l'œuvre lui a été reconnue au terme des travaux d'un comité interministériel d'experts en propriété intellectuel, présidée par madame Mono Ndjana (Hubert ndlr), il y a douze ans; comité d'experts dont la création trouve ses origines dans la vive polémique que le Pr Hubert Mono Ndjana, alors Président du Conseil d'Administration d'une structure de droits d'auteur et de droits voisins, nourrissait dans le but de refuser à son «frère Eton» la paternité du sceau de l'état. Contre vents et marrées, une issue à l'amiable a été trouvée courant avril 2005, octroyant à l'artiste un montant forfaitaire pour ses droits (l'auteur souhaite le silence sur le montant), ainsi qu'une indemnité mensuelle pour sa survie quotidienne. Malheureusement, ce n'était que pure chimère, une belle utopie mue alors pour endormir un esprit qui commençait à se faire grégaire. Attente interminable. C'est justement depuis 2001 que Michel Modo attend le paiement de ses droits d'auteur. Une minable somme qui ne représente même pas le montant du seizième que l'Etat alloue annuellement à la consommation des carburants et lubrifiants, encore moins le quart de ce qui a été alloué cette année aux loyers et hôtels des Sous-préfets ou même le dixième de l'enveloppe des primes et gratifications offertes aux députés ou aux agents du Ministère des Finances. On en conclut sans risque de se tromper qu'il s'agit là d'acte de mauvaise foi de la part d'une République qui a choisi de tronquer sa propre histoire en appelant ses héros «Maquisards». Comment comprendre en effet que pour ces minables droits d'auteur, selon des sources, le dossier aurait été transmis à la Primature puis à la Présidence de la République où il se trouverait en ce moment. La petite histoire C'est justement le 29 janvier 1957 que Michel Modo, à la demande du père Tsala Théodore, met en scène les épopées du jeune Afini et de sa jumelle Kara, sous la forme d'une mini bande dessinée. L'histoire anthropologique du sceau de l'état raconte que le jeune Afini, en montant au ciel avait, selon les prescriptions des oracles, donné trois épis de sésame à sa sœur qui devait les souffler pour en répandre les graines au sol en guise de fertilité; avant d'intégrer elle-même les profondeurs des océans où elle devait y demeurer pour l'éternité. Or, c'est en soufflant sur les tiges qu'avec la force du vent, l'une des trois se retrouva derrière sa tête. Les forces de l'eau et de la terre s'affrontaient justement pour recevoir les graines de sésame. Et c'est donc ce dessin (bref juste une partie ndlr), produit ce 27 janvier d'il y a 57 ans qui sera retenu par André Marie Mbida, alors Premier Ministre du Cameroun lorsque sous le feu des indépendances, le pays est appelé à déposer ses armoiries, son hymne national et son sceau à l'Assemblée Générale de l'ONU pour la reconnaissance internationale. Et depuis lors, le gamin inconscient de 07 ans, devenu un adulte attend et continu d'attendre que ce qui lui est dû. A défaut d'argent, juste un peu de reconnaissance de la part de l'Etat afin que comme De Gaulle en France, un nom camerounais puisse rentrer dans son histoire: Michel Modo




Dans la même Rubrique