La polygamie est l’état de l’homme qui est marié à plusieurs femmes simultanément. Dans la province de l’Ouest, elle a pignon sur rue, dans nombre de ménages.
1- Les causes
Selon certains polygames, les raisons qui poussent à la polygamie sont légions.
L’infidélité de la femme est l’une des causes. “ Je suis chauffeur et je fais la ligne du Nord. Aujourd’hui j’ai 3 femmes. Parce que la première m’avait trahi. Chaque fois que je voyageais pour une semaine, elle découchait. Elle avait trouvé un répondant, bien connu, qui s’occupait d’elle. Il y avait des moments où celui-ci venait carrément passer les nuits chez moi et ne repartait qu’au petit matin. Lorsque j’ai été informé, j’ai utilisé un stratagème pour la prendre la main dans le sac : un voyage a été malicieusement programmé pour le Tchad.. J’ai fait mon sac comme à l’accoutumée et je suis sorti. Elle m’a dit au revoir. Aux environs de 23 heures, je suis revenu. J’ai frappé à la porte pendant longtemps ; elle ne s’est même pas dérangée. C’est alors que je l’ai défoncée pour accéder dans la maison. Je suis tombé des nues quand j’ai découvert que c’était mon patron qui entretenait des relations coupables avec mon épouse. Je ne l’ai pas répudié, parce que nous avions 5 enfants. Pour me consoler, il m’a fallu devenir polygame ”, révèle Jacob Tchio.
Pour d’autres, c’est la passion. C’est-à-dire l’insatisfaction sexuelle. Elle est motivée par le désir de découvrir et d’explorer d’autres gabarits féminins. “ la passion fait que quand on prend la 2ème épouse, on est tenté, tout de suite, de prendre, la 3ème, voire la 10è sans toutefois abandonner les concubines ”, confesse un polygame.
Pour les uns, la notoriété d’un homme dépend du nombre de femmes et d’enfants qu’il a dans sa concession. “ Je suis fils unique de ma mère. Aujourd’hui, j’ai 45 ans. Je suis marié à 3 femmes. Mon souci est de procréer pour m’assurer une descendance nombreuse ”, confie un cultivateur. “ Dans les communautés séculaires, la polygamie conférait à l’homme, un titre de noblesse. Celui qui avait par exemple 30 enfants, aspirait à devenir un chef de quartier. Les filles qu’il envoyait en mariage, lui procuraient, une dot substantielle. Par ailleurs, il disposait d’une main-d’œuvre importante pour l’exécution de ses travaux champêtres. La polygamie des chefferies avait pour finalité le peuplement du village ; c’est pourquoi, les jumeaux étaient très honorés. Parmi les femmes qu’on retrouvait dans les chefferies, il y avait les femmes des étrangers. Elles ne couchaient pas avec le chef. Lorsqu’un colon débarquait, on lui trouvait une femme. Celle-ci lui offrait ses services pendant tout son séjour ”, renchérit, le chef du groupement Bamendjinda dans les Bamboutos, sa majesté Jean Marie Tanefo.
Pour les autres, c’est l’infécondité ou la stérilité de la première femme. “ Je suis chrétien. J’ai passé 15 ans de mariage avec ma première épouse. Elle n’avait pas conçu pour cause d’un problème gynécologique. Avec son accord j’ai pris une seconde femme. Aujourd’hui j’ai plusieurs rejetons. Mais je suis excommunié. Car la polygamie est interdite par l’église. ” regrette Boniface Kemta.
2-La vie des femmes
Les rapports entre les épouses ne sont pas toujours empreints d’estime. “ Nous sommes quatre femmes dans le ménage. L’estime que nous manifestons au quotidien n’est que de surface. Il ne reflète pas notre for intérieur. Nos relations sont nimbées de méfiance, médisance, rivalités, guerres de positionnement et de jalousie. Car, chacune veut posséder le mari ou tout au moins gagner la première place. Dans certaines concessions, des pratiques magiques sont courantes pour parvenir à cette fin. Des femmes y laissent souvent leurs plumes ”, confie mère Geneviève.
Pour gagner le pari de la survie, en dépit du soutien matériel et financier conjoncturel du mari, elles doivent travailler durement, pour subvenir aux besoins de leurs enfants. Madame Odette, bayam-sellam confie. “ Avec ma houe, j’assure. Mon champ est un exutoire. Mon mari est un ancien maître d’école primaire. Tous les trimestres, il perçoit sa pension de 15 000 F, qu’il dépense surtout dans l’alcool. J’ai sept (7) enfants et ma co-épouse en a cinq (5). J’essaye d’écouler mes produits sur le marché de Mbouda pour nourrir les miens. L’homme qui a cependant réussi à me donner le sourire se trouve en ville.” Elle n’en dit pas plus.
3-La vie du conjoint
Selon Sa Majesté Jean Marie Tanefo, la gestion des femmes dans un ménage polygamique se fait avec doigté. “ Au départ, il les considère avec impartialité. Au fils des temps, il constate les faiblesses, forces et rendement (fidélité, civilité) de chacune. Le traitement qu’il réservera à chaque femme dépendra de son aptitude à le servir selon ses convenances. Mais, il a toujours un penchant pour celle que le destin a bien voulu qu’il aime. Par ailleurs les femmes qui s’estiment être aimées donnent à leurs enfants l’occasion d’aimer leur père. En revanche, celles qui se sentent lésées les opposent à lui ”, confie-t-il. Il poursuit que sur le plan sexuel, le polygame ne fait par l’amour, il fait des enfants. “ Chaque femme doit avoir un dossier médical en bonne et due forme, tenu et surveillé. Si une femme est infectée d’une maladie sexuellement transmissible, le risque est grand que toutes les autres soient atteintes ”, révèle-t-il.
En définitive dans un foyer polygamique, l’homme vit dans la peur et l’insécurité. Il compte sur toutes les femmes et finalement sur personne. Un adage bien connu de chez nous nous dit que “ le polygame dort généralement affamé. ” C’est tout dire.