Une énième tentative d’évasion récemment à la prison centrale de New-Bell a entraîné un renforcement drastique des mesures de sécurité. Les visiteurs en pâtissent.
Ne parlons plus des pensionnaires. Le 31 juillet dernier le jeune Halilou Hassan, 25 ans, incarcéré à la prison de Bertoua depuis 4 jours seulement, c’est-à-dire le 27 du même mois a tenté de se faire la belle très tôt le matin. Mal lui en a pris.Son aventure a tourné court et il a été repris. Il n’y a pas longtemps à Kondengui, on a signalé pareil méfait.
Il va sans dire que rien ne vaut la vie, la santé et la liberté. Il faut avoir été cloué au lit pendant un laps de temps par une maladie pour en savoir quelque chose.Lorsqu’on réduit votre espace de mouvement dans un périmètre circonscrit, au bout de quelques heures seulement, le stress vous envahit. Quand c’est dans un lieu aussi malsain qu’un cachot, c’est dramatique. On comprend pourquoi des détenus plus ou désespérés tentent de s’évader. Même au prix de la vie. Certes, comme l’a claironné un ministre camerounais, il n’existe nulle part dans le monde des prisons « 4 étoiles ». Mais les pénitenciers camerounais pour la plupart datent des années coloniales. En dehors de celles de Kondengui et de Mfou qui datent respectivement des années 70 et 80 et qui ne sont pas moins surpeuplées. C’est aussi depuis les années 70 que feu Ayissi Mvodo, alors tout puissant ministre de l’Administration territoriale avait annoncé la construction d’une nouvelle prison à Douala, non seulement pour décongestionner celle de New-Bell, mais pour l’éloigner de son site déjà étroit.
Plus de 40 ans après, on fait du surplace. Entre temps de nouvelles unités de police et de gendarmerie, de nouveaux palais de justice ont été construits ça et là, ils envoient tous les jours dans les mêmes prisons femmes, mineurs, bandits de grand chemin, voleurs de poulets et boîtes de sardines. Ce qui ne fait qu’augmenter la population carcérale. Loin de nous l’intention d’absoudre les polissons et les « petits » voleurs, puisque qui « vole un œuf volera un bœuf ». Mais il arrive que les auteurs de délits mettent beaucoup de temps en détention préventive. Des années parfois. L’avènement du nouveau code de procédure pénale depuis trois ou quatre ans a été élaboré dans la perspective d’accélérer les procédures. Il semble qu’il se heurte au nombre insuffisant des magistrats. Soit. Mais, quid de la collaboration entre les parquets d’instance et les services du ministère des Affaires sociales ?
Cette collaboration pourrait contribuer à accélérer l’examen des dossiers de délits de manière à ne pas garder trop longtemps en détention des délinquants primaires. Certes, la surpopulation carcérale est un problème presque universel. Mais un peu partout on examine les voies et moyens susceptibles de porter un peu d’oxygène dans les prisons et plus de soins aussi pour ne pas en faire des mouroirs. C’est pour nous l’occasion de poser le problème du quartier dit VIP de la prison de New-Bell qui a brûlé il y a un peu plus d’un an et dont les travaux de reconstruction semblent piétiner comme d’ailleurs les procès de ces personnalités.
Bien entendu, le temps de la justice n’est pas celui des journalistes. Mais nos prisons connaissent de réels et gravissimes problèmes de droits humains et d’environnement. Deux valeurs qui préoccupent au plus haut point la communauté internationale et qui sont des critères par excellence des Etats qui se veulent modernes.
Au problème des conditions de détention se greffe celui des conditions de travail des gardiens de prisons. Le nombre de ces derniers ne suit pas la courbe ascendante de ceux qu’ils sont appelés à garder et à surveiller nuit et jour. Il y en a qui sont censés jouir de leur retraite depuis 2008 et qu’un acte présidentiel à maintenu en poste depuis. A ce jour, il végètent sans salaire. De quoi pense-t-on qu’ils vivent ? De la corruption et du racket sans doute. Pendant ce temps, dans la rhétorique administrative et gouvernementale, on lutte contre la corruption. Comme cela ? De qui se moque-t-on ? Du président de la République ou de ces pauvres et bons bougres. S’ils ont fini par s’ouvrir au quotidien Le Messager, c’est qu’ils n’en peuvent plus. Vivement que ce fameux décret présidentiel qui date déjà de cinq ans leur soit appliqué et qu’un concours soit organisé pour renforcer les effectifs de gardiens de prisons à travers le pays.
Ce ne sont pas les chercheurs d’emploi qui manquent dans ce pays. Dans le recrutement des 25 000 jeunes diplômés, on pouvait bien en trouver pour renforcer les effectifs de l’administration pénitentiaire. Il faut d’ailleurs dire que n’eut-été la collaboration internationale à travers l’Union européenne et l’assistance humanitaire des organisations de la société civile on connaîtrait à coup sûr un scandale similaire à celui du train de la mort en 1961. De grâce, il est grand temps d’humaniser les prisons.