Le gouvernement relance le processus de privatisation de la Cdc, avec le risque d'en réduire la valorisation pour éviter le flop du précédent appel d'offres.
L'appel à manifestation d'intérêt lancé cette semaine par le ministre des Finances et du Budget, Michel Meva'a m'Eboutou, en vue du recrutement d'une banque d'affaires ou d'un cabinet de consultation pour définir des mécanismes de privatisation de la Cameroon Développement Corporation relance de fait le processus de privatisation de cette mastodonte du secteur agro-industriel Cameroun créé depuis 1957. Aux termes de l'appel lancé par le patron des privatisations aux Camerounais, le rôle du consultant ou de la banque d'affaires recherché est d'aider le gouvernement à remettre le processus de privatisation sur les rails, et de le conduire à son terme.
La lettre d'intention adressée en décembre 2003 au directeur général du Fonds monétaire international d'alors, sans nier l'impasse dans laquelle se trouve le processus donnait déjà un aperçu des mesures qui seront prises. En ce qui concerne le programme de privatisation, le gouvernement procèdera à la mise en œuvre du plan d’actions élaboré en collaboration avec la Banque mondiale pour la privatisation des trois filières restantes (banane, huile de palme et hévéa) de la Cdc. Il recrutera des experts de réputation internationale avant fin novembre 2003 pour : “ l’analyse des accords signés par la Cdc relatifs à la filière banane ; l’évaluation de cette filière et enfin le diagnostic de la Cdc et la formulation de la stratégie de privatisation". Le moins que l'on puisse dire, c'est bien que le gouvernement n'a pas pu exécuter ce schéma selon le calendrier. Car le processus amorcé cette semaine aurait dû être achevé depuis de décembre 2003.
Difficultés. Pour l'essentiel, la stratégie de privatisation définie par le gouvernement depuis quelques années ne changera pas. L'option de privatiser distinctement chaque filière (banane, hévéa, huile de palme) va être maintenue, d'autant que la filière thé a déjà été cédée à un "groupe sud africain" en octobre 2002. Le gouvernement le dit d'ailleurs explicitement lorsqu'il affirme que le rôle du consultant sera de mettre en œuvre la stratégie de privatisation adaptée par le gouvernement.
Ce faisant, le gouvernement camerounais relance ainsi le processus de privatisation de la plus grande compagnie agro-industrielle du pays (13 000 employés) qui opère dans quatre des dix provinces du pays. Un consultant ou une banque d'affaires est en cours de recrutement, a annoncé le ministre des Finances et du Budget, pour aider le gouvernement dans la finalisation du processus, notamment à travers la définition d'une stratégie de privatisation, le validation des état financiers de la compagnie, la préparation d'une campagne de marketing à mener auprès des potentiels repreneurs. “ L'objectif principal recherché à travers la privatisation de la Cdc, explique Michel Meva'a m'Eboutou, le ministre des Finances et du Budget qui gère les opérations de privatisation, est de permettre l'amélioration à moyen terme des performances de la société et la libération de l'important potentiel de croissance dont elle dispose". La Cdc, qui dispose de 98 000 hectares de terres, a produit, en 2003, 22 000 tonnes de caoutchouc 21 000 tonnes d'huile de palme, 4500 tonnes de palmistes et 113 000 tonnes de bananes.
Arguments de conjoncture. La relance du processus actuel arrive dans un contexte où le processus global de privatisation des entreprises du portefeuille de l'Etat est quasiment gelé depuis deux ans, du fait d'une impasse complète sur les procédures. Et le problème va être plus évident pour cette seconde phase. Car le premier appel d'offres ayant été déclaré infructueux pour chacune des filières, nul ne sait encore si l'idéal pour parvenir à la privatisation à tout prix n'est pas de corriger à la baisse la valorisation, alors que chaque secteur dispose pourtant d'un très fort potentiel de rentabilité.
Faut-il rappeler que les premiers appels d'offres ont été annulés faute de repreneurs ? La tentation sera dont forte pour le gouvernement de donner une allure plus avenante aux dossiers de privatisation, de corriger la valeur financière de l'entreprise au franc symbolique, aidé en cela par des arguments de conjoncture. Les filières huiles- de palme et banane ont certes un marché important, mais la conjoncture internationale reste capricieuse pour ces produits. Quant à la Banane, l'Etat a certes déjà conclu un partenariat utile avec le firme Del Monte qui "assiste" la Cdc dans l'exploitation de cette filière. Le problème reste la compétitivité globale de cette filière au Cameroun. Car le coût de production de la tonne de banane au Cameroun reste substantiellement supérieur au coût de production de la "banane dollar" produite par les firmes américaines en Amérique latine. Or la banane dollar est la principale concurrente de la banane camerounaise sur les marchés européens.