Affaire Bakassi: Le Hic d’Abuja

Par PATRICE M BOSSA | L'Action
Yaounde - 18-Feb-2004 - 08h30   53931                      
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La commission mixte bilatérale Cameroun-Nigeria qui vient de se réunir à Abuja mardi et mercredi derniers n'a pas comblé toutes les attentes.
Pour la 8e fois, Camerounais et Nigérians se sont réunis les 10 et 11 février dans le cadre du suivi de l’arrêt de la Cour international de Justice (CIJ) du 10 octobre 2002 relatif à la démarcation des frontières maritimes et terrestres entre les deux Etats. Cette rencontre, comme les précédentes, était placée sous la supervision de l’ONU représentée par une délégation conduite par le Mauritarien Ahmedou Ould-Abdallah. C’est la première fois que les trois parties se retrouvaient après le retrait et le transfert d’autorité dans la zone du Lac Tchad (du 5 au 18 décembre 2003), où 33 villages ont été rétrocédés au Cameroun et un seul village au Nigeria. C’est dans cette dynamique que se situait la rencontre qui vient de se tenir à Abuja. Selon un programme préalablement arrêté par les parties, la commission mixte devait se rendre sur la presqu’île de Bakassi. Les autorités nigérianes ont estimé qu’il fallait différer cette visite et la programmer en fin février ou même en mars ; ce qui a suscité des protestations de la part des autorités camerounaises et de la délégation onusienne. Au sein de l’exécutif nigérian, on perçoit d’ailleurs deux sons de cloche. Selon le ministre de la Justice, d’ici la fin de l’année 2004, les troupes nigérianes auront libéré la presqu’île envahie. Par contre, pour Chief Bola Ajibola, chef de la délégation nigériane, point n’est question de libérer Bakassi. Pour lui, une négociation s’impose entre les parties camerounaise et nigériane. Chief Bola Ajibola, doit-on le rappeler, était l’agent du Nigeria à la CIJ. Il considère l’arrêt de la Cour internationale de justice en faveur du Cameroun comme un échec personnel. Il y a lieu de s’interroger sur sa volonté de poursuivre le processus de libération de la zone de Bakassi à laquelle il tient mordicus, malgré le verdict sans appel du 10 octobre 2002. Pourtant, le chronogramme du retrait des troupes ne devrait pas souffrir de modifications significatives. On sait qu’en mars, le personnel d’observation doit se déployer dans la presqu’île camerounaise de Bakassi. Le mois suivant, les Nigérians doivent commencer à en retirer leurs forces militaires, la police et l’administration civile et que ce retrait serait achevé en mai 2004. La réticence de la partie nigériane cache mal la volonté des autorités étatiques de prolonger leur séjour dans cette zone. En décidant de la création d’une commission mixte lors d’une rencontre organisée par le Secrétaire général des Nations unies, les présidents Paul Biya du Cameroun et Olusegun Obasanjo du Nigeria voulaient justement hâter le processus de retrait des troupes dans les zones litigieuses et harmoniser leurs relations. Rien ne garantit aujourd’hui le respect du calendrier initialement arrêté de commun accord par toutes les parties prenantes. Pourtant, l’arrêt de la Cour internationale de la Justice n’est pas à négocier. L’ONU s’est particulièrement préoccupée de ce contentieux frontalier depuis que le Cameroun a saisi la juridiction internationale en 1994. Le Nigeria qui a accepté la compétence de la CIJ est tenu de respecter le verdict du 10 octobre 2002.




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