Affaire Freedom Fm: Le temps des clarifications

Par Noé Ndjebet Massoussi | Le Messager
Douala - 29-Sep-2003 - 08h30   53140                      
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Depuis l’attribution des autorisations provisoires de canaux et de fréquences survenue vendredi dernier, le Mincom s’emploie à un matraquage médiatique sans pareil. Dans l’optique de créer diversion et amalgame au sujet de Freedom Fm dont les promoteurs ont saisi la justice. Aux fins de rentrer dans leurs droits.
“Quand on veut noyer son chien, on l’accuse de rage.” Il n’y a peut-être pas meilleure image que celle-là pour traduire les contre-vérités que sème à tout vent le ministère de la Communication ces derniers jours. En 4 jours, ce département ministériel, par le biais de son ministre et de son conseiller technique n° 1, a multiplié des interviews tant dans la presse de service public que privé. Ce matraquage médiatique vise à créer l’amalgame au sujet de Freedom Fm, station de radio diffusion sonore du Groupe Multimédia Le Messager interdite et scellée depuis le 23 mai dernier. Mais quatre mois après, c’est toujours le silence radio, en respect à l’arrêté ministériel d’interdiction pour “exercice illégal de la profession de diffuseur en communication audiovisuelle”. Ce que le Mincom refuse de porter à la connaissance de l’opinion, c’est que le dossier de Fréquence Liberté - le premier nom donné à la station de radiodiffusion du Groupe Multimédia Le Messager - a été déposé dans les services de ce ministère en fin octobre 2002. Et que en fin mai 2003 lorsque cette radio entend démarrer ses programmes, le délai maximal de 6 mois, reconnu au ministre chargé de la Communication par l’article 15 alinéa 3 du décret 2000/158 du 3 avril 2000 fixant la libéralisation de l’audiovisuel au Cameroun “pour notifier à tout postulant à la création d’une entreprise privée de communication audiovisuelle, décision de signer ou de refuser l’autorisation d’installation”, était expiré. Face à ce silence des autorités compétentes (?), les promoteurs de cette station, qui ont informé entre-temps lesdites autorités du changement de nom de la station, ont décidé de démarrer les activités de cette nouvelle radio, dont le thème est le développement humain. Cette décision de démarrer sans autorisation d’installation que les cadres du Mincom appellent autorisation provisoire de fonctionner était guidée par au moins deux raisons. Premièrement, le décret portant libéralisation de l’audiovisuel est muet sur la conduite que doit tenir tout postulant à la création d’une entreprise dans ce secteur après l’expiration du délai maximal de 6 mois. Sachant que “qui ne dit rien consent”, les obligations économiques exigent que le lourd investissement consenti soit rentabilisé. Deuxièmement, pendant que la station de radiodiffusion du Messager est en plein chantier, elle reçoit la visite d’une commission technique du Mincom, en février 2003 qui, après avoir passé aux peignes fins équipements de basse et haute fréquence, certifie aux promoteurs qu’il n’y a aucun problème sur le plan technique. Mais quelle n’est pas la surprise des promoteurs de Freedom Fm d’entendre que leur radio captée sur la bande Fm 100.0 crée des interférences; et qu’il faille délocaliser l’émetteur sous le fallacieux prétexte que Douala est saturée ? Qui donc de Freedom Fm ou du Mincom est dans l’illégalité ? Surtout que l’acte d’interdiction n’intervient qu’environ 8 mois après le dépôt du dossier et 6 mois presque après le changement du nom. Et le procès alors ? L’arrêté n° 023/Mincom/Sg/Cj du 21 mai 2003 portant interdiction de la station de radiodiffusion sonore “Freedom Fm” pour “exercice illégal de la profession” servi aux promoteurs de cette station le 23 mai à 13 heures 15 leur est tombé comme un coup de massue sur la tête. Et comme si cela ne suffisait pas pour ne pas émettre, une escouade de gendarmes et policiers ont débarqué armes aux poings en compagnie de MM Hondt et Ebona Nyetam, respectivement chef cellule juridique au Mincom et délégué provincial de la Communication pour le Littoral. Une longue discussion s’en est suivie au sujet de l’apposition des scellés à l’immeuble siège à Bonabéri. Ni les explications des promoteurs de Freedom Fm qui ont démontré à leurs interlocuteurs que c’était une précaution inutile, restées vaines; ni l’engagement sur l’honneur - de ne pas émettre un seul son - écrit par les deux responsables locaux de la Sûreté nationale et du Mincom et signé par le directeur général du Groupe Multimédia Le Messager n’ont pu arrêter la volonté et la détermination de ces “envoyés spéciaux” d’accomplir leur sale besogne. Ce commando a même eu tout un cours de Jean Vincent Tchienehom, l’un des promoteurs de Freedom Fm, sur les équipements basse et haute fréquence de la radio. “Pour qu’une radio n’émette aucun son, il suffit de sceller l’émetteur. Il n’est ni nécessaire, ni intelligent, encore moins économiquement viable de sceller les équipements basse fréquence qui nécessitent un entretien permanent”, leur avait-il suggéré. Mais les conseils de ce vétéran du micro ont, comme de l’eau sur le plumage du canard, glissé sur les oreilles du délégué provincial à la Sûreté nationale pour le Littoral, le commissaire divisionnaire Jean-Joël Ondo qui a ordonné l’apposition des scellés sur l’émetteur et la cabine technique. Il a été appuyé dans sa décision par cet avis d’un technicien de la Crtv qui les accompagnait : “tout ce qui est dans ce bâtiment peut émettre”. Scandale ! C’était sans doute la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Au point où un ensemble de matériels non liés au fonctionnement de la radio est jusqu’aujourd’hui hors d’usage. Il s’agit de la cafetière, de la caisse à outils du technicien, des ordinateurs dans les bureaux, etc. Force est cependant de relever que les scellés ont été apposés à Freedom Fm au moment où le bâtiment est encore un vaste chantier. Les travaux d’installation du pylône sur la toiture n’étaient pas encore à leur terme. La toiture devait subir l’étanchéité pour fermer les nombreux trous qui y ont été ouverts. Toutes ces doléances ont été portées au ministre Jacques Fame Ndongo et à ses proches collaborateurs, ainsi qu’au gouverneur de la province du Littoral, Gounouko Haounaye. Depuis le 26 mai 2003, il se tient des réunions explicatives entre les collaborateurs du Mincom et les promoteurs de Freedom Fm d’une part, et d’autre part entre ceux-ci et le Mincom lui-même. C’est d’ailleurs au cours de la réunion de synthèse du 26 mai que Jacques Fame Ndongo, après avoir marqué son étonnement sur l’apposition des scellés, a affirmé n’avoir jamais ordonné un tel acte. Et a demandé aux promoteurs de Freedom Fm de lui accorder un peu de temps pour voir ce qu’il pouvait faire. Un mois plus tard, face au silence de leur interlocuteur, les promoteurs de cette station interdite ont saisi par écrit le Mincom à ce sujet. C’était le 26 juin 2003. La lettre est jusqu’aujourd’hui sans réponse. Entre-temps, lors de la dernière réunion le 20 août dernier, Félix Zogo, conseiller technique n° 1 au Mincom rassurait que les scellés allaient être levés le lendemain, 21 août. Mais toujours en vain. Sans se lasser, les promoteurs de Freedom Fm, qui entre-temps ont introduit un nouveau projet dénommé City Fm dont le thème porte sur le développement urbain à Douala, avait repris langue avec Félix Zogo. Celui-ci, certainement embarrassé a abandonné Antoine Lobe, l’un des promoteurs de Freedom Fm dans les rues de Yaoundé. “Sans aucune autre voie de recours, seul le juge nous restait parce que personne ne voulait plus nous recevoir et même répondre de cet acte d’apposition des scellés à Freedom Fm”, a confié Pius N. Njawé, directeur général du Groupe Multimédia Le Messager. Il poursuit : “Plusieurs fois j’ai entrepris des démarches pour rencontrer le gouverneur du Littoral, mais jamais je n’ai été reçu. Que fallait-il faire quand je sais que, compte tenu de l’état du bâtiment siège de Freedom Fm, les équipements et le matériel qui constituent pour moi un très lourd investissement sont en péril?” Le procès que les promoteurs de Freedom Fm ont intenté contre la délégation générale à la Sûreté nationale prise en la personne du délégué provincial, le divisionnaire Jean-Joël Ondo depuis le 3 septembre porte donc uniquement sur la levée de ces scellés. Diversion et amalgame Dans leur logique de divertir l’opinion au maximum et de créer l’amalgame et la confusion dans les esprits, Félix Zogo dans les colonnes de La Nouvelle Expression du 23 septembre (P 11) déclare que “le patron du Messager avait intenté une action en justice contre l’Etat, pour contester la mesure d’interdiction prise par le ministre de la Communication.” Un grottesque mensonge. Car à aucun moment, Pius N. Njawé n’a intenté un procès pour contester l’interdiction de Freedom Fm. Sinon comment peut-il expliquer l’introduction d’un nouveau projet dont il parle dans la même interview ? Le montage de ce nouveau projet participe d’ailleurs des concessions qu’ont faites les promoteurs de Freedom Fm pour éviter tout affrontement conflictuel au sujet de ce dossier. Or, Félix Zogo a même poussé le bouchon très loin en ignorant toutes ces concessions. Et comme cérise sur le gâteau, le Mincom brandit l’argument du procès contre l’Etat pour peser de tout son poids dans la décision des juges à Douala. Après avoir refusé d’endosser la responsabilité de l’apposition des scellés, le Mincom s’est immiscé dans l’affaire. Et Félix Zogo s’en vante. “Nous ne sommes venus qu’en “intervention volontaire” (une démarche bien connue de nos codes de procédure judiciaire), pour expliquer au juge les tenants et les aboutissants de l’apposition desdits scellés.”, a-t-il déclaré à La Nouvelle Expression. Pourquoi cette “intervention volontaire” maintenant alors que le Mincom qui a auparavant nié l’acte n’est pas cité dans l’affaire? N’est-ce pas là une volonté délibérée de créer à perpétuité le dilatoire pour nuire davantage au projet du Groupe Multimédia Le Messager qui leur fait tant peur ? A la fin, la leçon est claire : dans le contexte actuel - veille de la présidentielle au Cameroun - le Groupe Le Messager ne mérite-t-il pas d’avoir une radio? Pour le Mincom et l’Etat du Cameroun, on ne saurait envoyer un enfant récalcitrant chercher la chicote avec laquelle il sera battu? Que le contraire soit prouvé !




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